Demain c’est Jeudi Saint à Besançon.
En effet, ce jeudi 6 juin 2013, la première rame du tramway sera livrée – bien emballée – sur un très long camion en provenance de Saragosse (Espagne).
Après plus d’un an et demi d’un chantier omniprésent dont chacun souhaite désormais apercevoir la fin, l’arrivée de cette chenillette bleu turquoise dans le paysage bisontin n’a rien d’anecdotique. Elle annonce le (presque) bout du tunnel. C’est en décembre 2014 que le tram bisontin entrera enfin en service.
On imagine aisément que la livraison de la première rame sera célébrée comme il se doit : presse conviée, discours émus, population invitée à venir toucher du doigt le pressssssieux, petits enfants bisontins chantant « Il est né le divin enfant… » (ou pas). On suppose aussi que l’événement sera filmé sous tous les angles : depuis le sol, le ciel, le sous-sol…
Nous voici donc à la veille de ce grand événement et un article de l’Est Républicain du jour annonce le programme. Dans cet article, un passage étonnant, étrange, mystérieux :
LA DATE n’a pas été choisie au hasard. « On nous avait promis la livraison de la première rame du tramway courant juin. On a voulu que ce soit précisément le 6, une date symbolique », explique dans un sourire Pascal Gudefin, directeur du projet tram à l’agglomération.
M’enfin ! Qu’est-ce qu’il veut dire le chef des tramophiles ? Qu’y a-t-il de si particulier le 6 juin et pourquoi avoir choisi cette date ? Où qu’il est le symbole ? Pourquoi ce sourire ? Est-ce un sourire sardonique ?
Alors évidemment, quand on vous dit « 6 juin », vous répondez « 44 » ; enfin j’espère. Au mieux parce que vous avez un minimum de culture historique. Au pire par simple réflexe neuronal parce que « 6 juin » ça va avec « 44 » et pis c’est tout !
Le 6 juin 1944 donc, le fameux D-Day, jour du débarquement des troupes alliés en Normandie – est-ce à cette date historique que notre « tramoculteur en chef » se réfère ?
Mais non bien sûr. Notre première rame n’est pas britannique, pas américaine, ni même canadienne. Elle est espagnole. Et puis elle ne débarque pas : elle chemine par la route.
Et puis, franchement, un « directeur du projet tram » ne se permettrait pas de comparer l’arrivée d’un bout de métal-plastifié bleu turquoise – fusse-t-il cher et attendu – au débarquement héroïque de soldats prêts à donner leur vie pour libérer l’Europe du joug nazi.
Non, il n’oserait décemment pas.
Alors ? Qu’y a-t-il de symbolique dans cette date du 6 juin ?
Là j’avoue, j’ai dû creuser. J’ai commencé par m’informer sur le Saint du jour : c’est Claude.
Le 6 juin c’est la Saint Claude.
Saint Claude, né à Bracon (Jura) vers 607 et mort en 699 à Saint-Oyand-de-Joux (auj. Saint-Claude), est un évêque catholique de Besançon.
(…) On l’honore le 6 juin. Il est le saint patron des tourneurs sur bois, qui sont nombreux dans le Haut-Jura. [source : Wikipédia]
Certes, il y a bien ici un lien avec Besançon mais voilà, le tramway il n’est ni jurassien (au grand dam de certaines dames) ni en bois. Cherchons une autre explication…
Pour ce faire, Wikipédia nous offre un outil précieux : pour chaque date du calendrier – par exemple le 6 juin – une page de l’encyclopédie collaborative en ligne répertorie les événements correspondants (naissances, décès, batailles, inventions…)
Pour notre 6 juin, il y a l’embarras du choix…
Tiens ! Nous avons par exemple le sacre de Charles II le Chauve en 848. Mais la référence me semble un tantinet éloignée du sujet qui nous intéresse.
Sinon, voilà Joseph Bonaparte – frère de l’autre – qui devint Roi d’Espagne le 6 juin 1808.
Hmm… Espagne / CAF / tram… ça pourrait le faire mais… c’est un coup à vous réveiller Mireille Péquignot ça. Pas sûr que ce soit une bonne idée. Passons.
Ah tiens ! J’ai autre chose : il y a un an pile poil, avait lieu le transit de Vénus devant le Soleil et c’était le dernier du XXIe siècle ! Bon bon… j’ai compris, je continue à chercher.
La naissance de René Monory le 6 juin 1923 ? Non : trop à droite.
Celle de Albert II, roi des Belges, en 1934 ? Non, non : trop belge.
Alors la naissance de Björn Borg en 1956 ? On aime bien le tennis à Besançon, non ? Non : à Besançon on célèbre le tennis FÉMININ.
Tiens ! J’ai quelque chose là ! La mort de Louis Lumière, il y a 55 ans, le 6 juin 1948 ! Ça tient le route ça non ? Louis Lumière et né à Besançon tout comme son frère Auguste avec lequel il a inventé le cinématographe – rien que ça !
Et puis vous savez quoi ? Les frères Lumière auront eux aussi leurs trombines sur une rame du tram.
Mouais… en fait non : les frères Lumière c’est un sujet tabou à Besançon, du fait de leurs affinités vichyssoises très prononcées durant l’Occupation. On s’éloigne de plus en plus du 6 juin 44… Laissons-là Louis Lumière.
Croyant ne jamais trouver l’explication de la date symbolique du 6 juin, j’ai bien failli abandonner… Et là je suis tombé sur le 6 juin 1978, date de naissance de Faudel.
Qui ça ?
Mais si allons ! Faudel. Ce chanteur de raï pour Top 50 qui rencontra quelques jolis succès à la fin des années 90, avant d’être oublié…
Faudel, que l’on surnommait « le petit prince du raï » aura 35 ans demain. Le jour où notre première rame de tram sera livrée.
Un hasard ? Une coïncidence ? Sans doute.
À moins que Faudel ait inspiré certaines vocations parmi les Bisontins et que ces derniers lui rendent ce petit hommage – le choix du 6 juin – en remerciement…
Et puis si vous n’êtes pas convaincus, il y a la thèse qui fait super peur mais là vous êtes prévenus.
Il est question de numérologie, regardez un peu :
6 / 06 / 2013 -> 2+0+1+3 = 6
Vous les voyez les trois 6 qui font 666 ? Sacrebleu ! Le nombre du Diable !
De là à affirmer qu’il y a des satanistes derrière le bleu turquoise, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas, mais bon… on a quand même la réponse pour le sourire : il était bien sardonique.
(merci Ganette pour cette explication).