Archives mensuelles : février 2013

Besançon : un arrêté anti-crottes de chiens purement décoratif

Une fois n’est pas coutume : parlons caca.
Non… rassurez-vous, pas du vôtre mais de celui de vos chers toutous.
C’est un article de l’Est Républicain de ce jeudi 21 février 2013 qui m’a donné envie de « creuser un peu » le sujet.

Qu’apprend-on dans cet article ?

Que les quelques 14.000 chiens bisontins produisent environ 3 tonnes et demi de crottes par jour (!)
Or, comme vous le savez sans doute, ces déjections – contrairement aux vôtres – ne terminent pas ici :

bisontine

Mais plutôt là :

crotte-1

Besançon, rue de la Madeleine

Alors certes, il y a ces fameux distributeurs de petits sacs-à-crottes (au nombre de 143 d’après l’Est Républicain) et il est vrai que l’on voit de plus en plus rarement des « maîtres à chien-chien » faisant mine de n’avoir rien vu et abandonnant derrière eux un étron canin offert à la semelle du malheureux passant. Beaucoup ramassent désormais et c’est tant mieux.

Mais voilà : il reste ceux-qui-n’en-n’ont-rien-à-foutre. Les égoïstes qui vous rétorquent méchamment quand vous leur faites remarquer qu’ils ont oublié quelque chose là, sur le trottoir. Au choix, ils vous suggéreront de vous « mêler de ce qui vous regarde » et vous feront remarquer que « vous n’avez qu’à marcher à côté ». Parfois, ils vous préciseront, au cas où vous ne l’auriez pas compris que « c’est pas moi, c’est mon chien ». Les plus culottés vous donneront même du « c’est naturel et biodégradable, vous savez… » .
Ils ne sont sans doute pas très nombreux ces « indécrottables », mais leurs chiens suffisent à vous pourrir un trottoir.

Heureusement, les piétons Bisontins ont depuis bien longtemps trouvé la parade en adoptant la fameuse démarche « tête basse » avec « regard qui balaie – façon radar – les 2 mètres de trottoir à venir« .
La faculté d’adaptation des Bisontins à leur environnement est absolument remarquable.

Rassurons-nous, le problème des déjections canines n’est pas typiquement bisontin et la ville de Belfort vient justement de taper du poing sur le trottoir sur la table. Une campagne façon fronçage de sourcils à destination des maîtres indélicats baptisée « Nom d’un chien, ramassez« .

En substance, Belfort a mis en place des distributeurs de sacs-à-crottes comme à Besançon mais les contrevenants rechignant à ramasser se verront désormais verbalisés d’une amende de 35 euros pour chaque abandon d’étron de toutou sur la chaussée. L’arrêté municipal belfortain fixant ces règles est récent ; il date du 13 septembre 2012.

Et qu’en est-il à Besançon ?

Dans son article, l’Est Républicain rapporte les propos de David Mourot – directeur des espaces publics de la Ville de Besançon. Et là nous découvrons qu' »à Besançon c’est quand même vachement plus cool ! » :

« On a toujours privilégié le dialogue, avec un certain succès. »

Et de nous resservir les médiateurs qui rappellent aux distraits de la crotte qu’ils doivent ramasser… Et de nous citer quelques spots particulièrement sillonnés par ces médiateurs : le parc Micaud et les berges de la Gare d’eau.
Bah oui, sauf que voilà : les espaces verts c’est sympathique mais des crottes on en voit aussi beaucoup « en ville » sur les crottoirs trottoirs. Pour emprunter souvent le quai de Strasbourg, je peux vous dire que chaque fois, c’est « slalom géant » entre les petits cadeaux de toutou.
[Je vous laisse d’ailleurs le plaisir de nous rapporter vos meilleurs « spots à crottes » dans les commentaires.]

Un arrêté municipal qui n’est pas appliqué

Et puis nous trouvons dans cet article cette autre phrase :

« Nous n’avons jamais verbalisé le propriétaire d’un chien, et aucun élu n’a donné de consigne en ce sens. »

Quel dommage que l’Est Républicain ait laissé passer cette phrase du directeur des espaces publics sans gratter un peu sous la surface. Car il y a là quelque chose de totalement aberrant.
Effectivement, aucun élu n’a à donner la consigne de verbaliser puisqu’il existe pour cela un arrêté municipal qui se suffit à lui-même. Et contrairement à celui que vient de prendre la ville de Belfort – l’arrêté municipal bisontin n’est pas récent. Il a déjà 8 ans.
Il date du 19 janvier 2005 et il stipule notamment (source : Ville de Besançon) :

Article 4
Il est interdit de promener son chien, même tenu en laisse sur les aires de jeux pour enfants, les terrains voués à la pratique sportive ainsi que sur les trois sites suivants : Clos Barbizier, Espaces verts de l’Esplanade des Droits de l’homme, Square Castan
Article 5
Il est fait obligation aux personnes accompagnées d’un chien de procéder immédiatement, par tout moyen approprié, au ramassage des déjections de leur animal sur l’ensemble des espaces publics (voirie, espaces verts, jardins…)
Article 6
Les infractions aux dispositions du présent arrêté sont passibles des amendes allant de 38 à 450 €

Donc l’arrêté municipal existe depuis pas mal d’années et il y a toujours des crottes sur les trottoirs. Et pourtant, nous découvrons ébahis que jamais un propriétaire de chien n’a été verbalisé depuis toutes ces années à Besançon. L’abandon de crotte reste un « crime » impuni.

Qu’en déduire ? Que non seulement aucun élu n’a jamais donné l’ordre de verbaliser mais qu’a fortiori, la consigne inverse a sans doute été donnée à la Police municipale dont la mission est précisément de faire respecter les arrêtés municipaux : n’appliquez pas cet arrêté et ne verbalisez pas les maîtres indélicats.

Et pourtant, que lisions-nous dans le BVV en mai 2004 ? (il était question du précédent arrêté municipal comparable à celui de 2005).

Ayant pour priorité de responsabiliser les propriétaires au même titre que la récente campagne de sensibilisation pour le ramassage des déjections canines, cet arrêté s’est traduit à ce jour de la part des policiers municipaux par de simples rappels à la loi en direction des propriétaires négligents. Une mansuétude qui, à terme, ne manquera pas de laisser place à une attitude plus répressive si les comportements ne changent pas.

En résumé : le service des espaces publics – et plus largement la ville de Besançon – a beau jeu de vouloir opposer le « sens du dialogue bisontin » à la « rigueur belfortaine ».
La médiation et la pédagogie sont certes indispensables et elles produisent des résultats. Mais refuser d’appliquer l’arrêté municipal existant – amendes à l’appui – au dernier îlot d’indécrottables égoïstes, c’est au-delà de la mansuétude et ça commence à ressembler à du laxisme…

crotte

En passant, l’article de l’Est Républicain s’achève sur cette remarque du directeur des espaces publics :

Un problème qui est tout de même bien mois impor­tant que celui des dépôts sauvages d’ordures ou d’encombrants dans la ville.

Il y aurait donc un problème de dépôts d’ordures sauvages à Besançon depuis quelques temps ? Un rapport avec la récente mise en place de la redevance incitative peut-être ? À suivre…

 

 

Ginko, les pneus neige et les bus cabriolets

Il neige ! Les bus Ginko rentrent au dépôt.
– Et nous on fait comment ?
– Eh bien comme d’hab : râlez et marchez !

À Besançon, ville de l’Est de la France où il neige tout de même quelques jours par an, c’est comme ça. Les raisons de cette incapacité de nos bus à affronter une couche de neige même modeste ? L’Est Républicain nous apporte quelques éléments de réponse dans un article du 6 février dernier.

Extrait :

Mais pourquoi diantre les bus sont-­ils à ce point frileux ?
« Par mesure de sécurité : les contraintes sont énormes, les bus peuvent glisser et renver­ser un piéton par essence plus nombreux en ville qu’en périphérie  Ils peuvent aussi occasionner des embouteillages supplémentaires, s’ils se met­tent en travers », note le servi­ce communication de Ginko. »

Voici l’argument n°1 : l’ouverture de parapluie.

Cette habitude se généralise un peu partout dans notre société frileuse. En résumé : si le maintien d’un service public est susceptible d’entraîner un risque – même minime – pouvant engager la responsabilité d’un donneur d’ordres, ce dernier suspend le service. Il ouvre le parapluie et tant pis pour la continuité du service public. Ceci passe au second plan.
L’exemple des transports scolaires de plus en plus souvent interrompus dès l’annonce d’une averse neigeuse en est une parfaite illustration.

Autre extrait de l’article de l’Est Républicain :

Reste qu’en dehors de la ville, les bus savent qu’il peut nei­ger en hiver en Franche-­Com­té, et chaussent des pneus adaptés. « En ville, ils n’en ont pas. C’est inutile pour 5 ou 6 épisodes neigeux dans l’an­née, c’est un problème de coût », confirme en marchant sur des œufs la com’de Ginko.

Voilà l’argument n°2 : les pneus hiver c’est trop cher ma p’tite dame…

Alors certes, il y a sans doute du vrai là-dedans. Équiper tous les bus de pneus hiver aurait un coût non négligeable qui serait forcément répercuté sur les tarifs.
Mais Besançon se trouve tout de même dans l’Est de la France, dans une région où la neige n’est pas un phénomène climatique exceptionnel. Dire que l’équipement serait « inutile » c’est un peu léger. Je pense que la/le responsable de de la communication de Ginko ne doit pas prendre souvent le bus en hiver.

Équiper certaines lignes particulièrement fréquentées semblerait pourtant logique. Et quand un bus est équipé d’un train de pneus hiver, use-t-il les pneus qu’il chausse durant le reste de l’année ?
Quant aux bénéfices que Transdev tire de l’exploitation de notre réseau de transport urbain, a-t-on aussi le droit d’y voir « un problème de coût » ou un élément « inutile » dont on pourrait tout à fait se passer ?  Hein ? On peut ?
Ah non en fait… On me souffle dans l’oreillette que ça ne marche pas comme ça… Mon raisonnement serait un tantinet naïf voire un brin anticapitaliste. Les bus c’est vachement plus compliqué.

ginko

Suggestion

Franchement Ginko. C’est pas un peu ballot de couvrir tes bus juste pour quelques jours de pluie par an ?
C’est pourtant évident : tu pourrais faire de sacrées économies en investissant dans des modèles cabriolets.

D’autant que si l’on y réfléchit bien, les avantages pour l’usager seraient loin d’être négligeables : fin des problèmes de buée sur les vitres, terminées les mauvaises odeurs du voisinage, une climatisation naturelle et écologique (un nouveau label pour Besançon ?) et enfin : une vue imprenable sur notre cher site UNESCO.

Vive le progrès !

 ginko

 

À Besançon, une ex-député UMP usurpe l’écharpe tricolore pour manifester contre le mariage gay

Ce samedi 2 février 2013, les opposants au projet de « mariage pour tous », manifestaient à Besançon.
Parmi eux, une délégation d’élus et cadres UMP locaux. Et puis aussi l’ancienne député UMP de la 2e circonscription du Doubs – Françoise Branget – battue en juin dernier par Barbara Romagnan (PS).

Aujourd’hui Mme Branget ne conserve qu’un seul mandat électif : elle est conseillère régionale de la région Franche-Comté.

Françoise Branget à la "manif pour tous" du 2 février 2013 à Besançon

Françoise Branget à la « manif pour tous » du 2 février 2013 à Besançon (photo : Loïc Ponce)

Voici une photographie prise sur le parcours de la manifestation. On y aperçoit des élus de droite Bisontins (Michel Omouri notamment) et de la région.
France 3 Franche-Comté donne une liste non exhaustive des élus présents. Parmi eux se trouve Françoise Branget (béret rouge).

Des élus et anciens élus de droite à la manif pour tous (2 février 2013)

Des élus et anciens élus de droite à la manif pour tous (2 février 2013)

Zoomons un peu sur Mme Branget car il y a comme un détail qui cloche. Tiens tiens…

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Comment ? Vous ne remarquez rien ? Alors voyons cette autre photographie :

Françoise Branget à la "manif pour tous" du 2 février 2013 à Besançon

Des élus de droite à la « manif pour tous » du 2 février 2013 à Besançon

Nous sommes ici place du 8 septembre (place Saint-Pierre si vous préférez). Derrière cette banderole, nous retrouvons Françoise Branget auprès d’autres élus. Sans doute des maires car la plupart portent l’écharpe tricolore.

Et voilà donc Mme Branget. Elle arbore un sourire radieux et… l’écharpe tricolore, elle aussi.
Serait-elle maire ? Non. Adjointe au maire ? Non plus.
Elle n’est plus conseillère municipale de Besançon depuis qu’elle a été élue conseillère régionale de Franche-Comté en mars 2010.

Est-ce au titre d’élue régionale qu’elle porte l’écharpe tricolore ? Certainement pas puisque le port de l’écharpe tricolore par les conseillers généraux et régionaux n’est tout simplement pas autorisé.
Voyez à ce sujet, la réponse que le ministre de l’Intérieur apporta à une question que le député Lionnel Luca (alors UMP) lui adressa en 2010 à l’Assemblée.

Extrait :

Aucun texte législatif ou réglementaire n’autorise le port d’écharpes tricolores (bleu, blanc, rouge) par les conseillers régionaux et les conseillers généraux à l’occasion des cérémonies officielles. Le port de telles écharpes par des élus n’en ayant pas le droit constitue une usurpation de signes, et est passible des sanctions prévues par l’article L.433-14 du code pénal […]

Mystère mystère… observons une photographie plus lisible prise à quelques minutes de la précédente :

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Et approchons-nous un peu :

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Françoise Branget porte l’écharpe tricolore avec la bande rouge près du col. Seuls les parlementaires (députés et sénateurs) portent l’écharpe comme cela. Les maires la portent avec la bande bleue en haut.
Problème de taille : Madame Branget n’est plus député depuis le mois de juin dernier.

Alors ? Un privilège d’ancien parlementaire peut-être ? À la manière de cette coutume un peu ridicule consistant à donner ad vitam æternam du « Monsieur le Président » ou « Monsieur le Premier ministre » aux anciennes gloires de notre République ?
Que nenni : l’écharpe tricolore est l’un des insignes officiels de la fonction de député (ou de sénateur). L’écharpe lui est remise avec « son kit d’accueil » lors de son arrivée à l’Assemblée Nationale. Lorsqu’un député perd son mandat, il rend son écharpe tricolore. Il n’a alors plus le droit de porter cet insigne. Ni plus ni moins que le quidam lambda. Aucune coutume républicaine ne l’y autorise.

Que risque Françoise Branget ?

Premièrement, notre ancienne député risque le rouge de la honte. Celui qui vient aux joues du gamin qui se fait prendre la main dans le pot de confiture. En l’occurrence, la situation est nettement plus pathétique que celle de notre garnement :  voilà une ancienne député continuant à s’y croire et allant jusqu’à usurper un insigne républicain rattaché à une fonction pour laquelle elle n’est plus mandatée.
Un cas de « déni d’élection perdue » qui devrait passionner plus d’un psychologue.

Deuxième risque et pas des moindres puisque c’est l’article 433-14 du Code pénal qui régit ce type de situation. Et il n’y va pas avec le dos de la cuillère :

Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende le fait, par toute personne, publiquement et sans droit :
  1.  De porter un costume, un uniforme ou une décoration réglementés par l’autorité publique ;
  2. D’user d’un document justificatif d’une qualité professionnelle ou d’un insigne réglementés par l’autorité publique ;
  3. D’utiliser un véhicule dont les signes extérieurs sont identiques à ceux utilisés par les fonctionnaires de la police nationale ou les militaires.

Évidente ironie d’une situation dans laquelle on se proclame « gardiens du Code civil » tout en foulant au pied le Code pénal.

branget2bis

On attend maintenant les réactions courroucées des Jeunes UMP du Doubs toujours prompts à réagir lorsqu’un symbole républicain est ainsi bafoué…

Pour aller plus loin :

  • Voici un courrier que le Préfet du Gard adressait en 2011 aux maires de son département afin de leur rappeler les conditions strictes de port de l’écharpe tricolore ;
  • Qui peut porter l’écharpe tricolore et dans quelles circonstances ? sur Wikipedia.

écharpe d'ancien député