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Grève et service minimum d’accueil à Besançon : mythes et réalités

Pour la deuxième fois depuis la rentrée scolaire, des enseignants seront en grève dans les écoles ce jeudi 23 septembre 2010.
A Besançon, la plupart des écoles seront concernées et certaines resteront totalement fermées.

Pour la deuxième fois depuis la rentrée scolaire, Édouard Sassard et Michel Omouri (conseillers municipaux UMP) dénoncent des défaillances dans la mise en place du Service Minimum d’Accueil (SMA) par la ville de Besançon.

Sans chercher à rentrer dans le débat pour ou contre le mouvement de grève en cours, il m’a semblé intéressant de revenir sur les arguments avancés par ces deux élus au regard d’une part, de ce que la loi a instauré et d’autre part, de ce qui est effectivement mis en place à Besançon.

Premier round : pas de service minimum d’accueil pour les enfants de Besançon ?

Voici le premier communiqué diffusé le mardi 7 septembre 2010 à l’occasion du premier mouvement de grève :

Communiqué presse de Michel OMOURI et Edouard SASSARD : Service minimum d’accueil à l’école.

Le droit de grève est une liberté fondamentale que nous devons saluer pour notre démocratie. Toutefois, il s’agit d’une liberté qui doit se concilier avec d’autres.

C’est pourquoi, le législateur est intervenu, en 2007, pour assurer la continuité des services publics en temps de grève, notamment dans l’éducation via le service minimum d’accueil.

Cette obligation légale relève des Maires. C’est donc légitimement que les familles bisontines sont en droit d’attendre son respect et sa stricte application par la municipalité.

Or, nous constatons sur le terrain qu’il en est tout autrement. Les parents d’élèves étant invités à garder leurs enfants.

Nous regrettons donc les défaillances municipales sur un événement que les médias annoncent déjà depuis un certain temps.

Il n’est plus possible de pénaliser les familles dont les parents travaillent et n’ont pas d’autres choix.

Gouverner c’est prévoir. Force est de constater que deux ans après le vote de cette loi, la Ville de Besançon se trouve encore et toujours dans l’incapacité de l’appliquer.

Nous faudra-t-il encore de nouvelles hausses d’impôts dans les années à venir pour le faire ou s’agit-il simplement d’une position partisane, qui oublie le quotidien de ceux qui travaillent pour financer notre système de retraite par répartition.

En toute hypothèse, il y a là un problème à résoudre dont l’opposition actuelle est prête à relever le cas.

Rappelons d’abord ce que dit la loi n° 2008-790 du 20 août 2008 instituant un droit d’accueil pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires pendant le temps scolaire.

Article 4 : En cas de grève des enseignants d’une école maternelle ou élémentaire publique, les enfants scolarisés dans cette école bénéficient gratuitement, pendant le temps scolaire, d’un service d’accueil qui est organisé par l’Etat, sauf lorsque la commune en est chargée en application du quatrième alinéa de l’article L. 133-4.

L’article L.133-4 du Code de l’Education ayant étant créé par l’article 5 de la même loi du 20/08/2008 :

Article 5 : (…)
L’autorité administrative communique sans délai au maire, pour chaque école, le nombre de personnes ayant fait cette déclaration et exerçant dans la commune.
La commune met en place le service d’accueil à destination des élèves d’une école maternelle ou élémentaire publique située sur son territoire lorsque le nombre des personnes qui ont déclaré leur intention de participer à la grève en application du premier alinéa est égal ou supérieur à 25 % du nombre de personnes qui exercent des fonctions d’enseignement dans cette école.
Les familles sont informées des modalités d’organisation du service d’accueil par la commune et, le cas échéant, par les maires d’arrondissement.

En résumé et chronologiquement :

  1. l’Inspection académique (autorité administrative) communique le nombre de grévistes pour chaque école aux services de la Mairie (les enseignants doivent se déclarer grévistes 48h au plus tard avant le jour de la grève) ;
  2. obligation est alors faite au Maire d’organiser le service minimum d’accueil pour les élèves concernés et scolarisés dans une école où le quart au moins des enseignants a déclaré son intention de faire grève.
  3. la commune informe les familles sur les modalités d’organisation du service d’accueil pour la commune.

Revenons maintenant sur les défaillances dénoncées par les MM. Sassard et Omouri dans la mise en place du service minimum d’accueil par la ville de Besançon.

Extrait :

Cette obligation légale relève des Maires. C’est donc légitimement que les familles bisontines sont en droit d’attendre son respect et sa stricte application par la municipalité.

Or, nous constatons sur le terrain qu’il en est tout autrement. Les parents d’élèves étant invités à garder leurs enfants.

En substance : Les deux élus UMP écrivent que le Maire de Besançon ne respecte pas strictement l’obligation qui lui est faite d’organiser le service minimum d’accueil puisqu’il invite les parents à garder leurs enfants auprès d’eux.

Dans les faits : comment cela se passe-t-il dans les écoles de Besançon ?

Le dernier jour ouvrable précédent la grève, les écoles reçoivent de la Mairie les informations à distribuer aux familles sous la forme d’un feuillet recto-verso par enfant concerné. J’ai mené une petite enquête sur le sujet et cela m’a été confirmé dans plusieurs écoles. Dans certaines écoles maternelles, la feuille est proposée aux familles par les personnels s’occupant de l’accueil périscolaire (la garderie du soir). J’ai pu le vérifier par moi-même en tant que parent d’élève.
Voilà ce document (celui-ci a été diffusé ce mardi 21 septembre et il concerne la grève du jeudi 23  mais, hormis la date, il est en tout point identique à celui qui avait été distribué aux familles lors du précédent mouvement de grève).

Un accueil est donc bel et bien proposé aux familles. La Mairie propose 268 places réparties dans 6 structures différentes à travers la ville et l’accueil y est organisé de 8h30 à 12h00 et de 14h à 16h30. Soit, comme la loi l’exige, durant les 6 heures correspondant au temps scolaire.

Quid de l’invitation de J.L. Fouseret à garder les enfants à la maison ? Vous la trouverez sur la première page. Le Maire écrit :

(…) je fais appel à votre sens civique et vous recommande dans toute la mesure du possible de garder votre enfant à la maison ce jour.

J.L. Fousseret exprime ici sa sensibilité politique et envoie également un message de soutien aux enseignants qui constitue une part non négligeable de l’électorat du PS.

C’est cette invitation du Maire adressée aux parents que MM.Sassard et Omouri ont mis en avant dans leur communiqué de presse mais en omettant délibérément de préciser qu’il ne s’agissait pas d’une injonction mais d’un conseil.
Bref, un passage sorti de son contexte dans un objectif que la dernière phrase du communiqué des deux élus UMP révèle de manière ostentatoire et pour le moins décomplexée :

En toute hypothèse, il y a là un problème à résoudre dont l’opposition actuelle est prête à relever le cas.

Le Maire de Besançon a  a rejeté ces critiques en rappelant que les conditions du service minimum d’accueil définies par la loi étaient respectées.

Deuxième round : un VRAI service minimum d’accueil à Besançon ?

Rebelote ce mardi 21 septembre : MM. Sassard et Omouri publient un nouveau communiqué daté du 17 septembre sous forme de lettre ouverte au Maire de Besançon.

Communiqué presse de Michel OMOURI et Edouard SASSARD : un vrai Service minimum d’accueil à l’école le 23 septembre

Besançon, 17 septembre 2010

Monsieur le Maire,

Suite à l’appel des familles, lors de la grève du 9 septembre dernier, concernant les possibilités d’accueil des enfants dans les écoles pour cette  journée, nous nous sommes interrogés sur la volonté du Maire de répondre à cette attente.

Le manque d’information avéré a malheureusement entraîné une utilisation réduite du dispositif : seulement 47 enfants ont été pris en charges pour 268 places d’accueil proposées.

Nous voulons un vrai service minimum d’accueil lors de la manifestation du jeudi 23 septembre, de telle sorte que les 268 places mises à disposition soient pourvues, avec une prise en charge totale pour la journée comportant toutes les prestations nécessaires (8h30-16h30 avec le déjeuner servi), sachant combien il est difficile pour les parents de récupérer leurs enfants pour le repas. La ville de Bordeaux l’a bien expérimenté en 2008.

N’oublions pas que l’Etat verse une indemnité aux mairies qui organisent un tel dispositif. Alors, Monsieur le Maire, si tout cela est mis en place nous pourrons dire qu’il y a un vrai service minimum d’accueil dans les écoles de Besançon !

Pour plus de transparence et d’efficacité, le nombre de places disponibles et le nombre d’élèves ayant profité du SMA devraient faire l’objet d’une publication.

Bien que vous soyez défavorable à l’instauration du SMA, pourtant plébiscité largement par l’opinion (72% des électeurs dont 83% des parents), les  usagers du service public ne doivent pas être pénalisés.

Il incombe au Maire d’une commune d’utiliser tous les moyens nécessaires pour répondre à l’attente des familles, souvent les plus modestes (familles monoparentales ou sans moyens de garde à domicile) ces jours de mobilisation et de perturbations.

Notre requête et nos propositions visent à laisser aux personnes qui travaillent, la même liberté que notre Démocratie accorde à celles qui font la grève.

Bien plus qu’un droit, il faut voir là une action à caractère de justice sociale.

Comptant sur votre compréhension quant à notre mobilisation, veuillez croire, Monsieur le Maire, à l’assurance de nos salutations les meilleures.

Cette fois, MM. Sassard et Omouri jouent sur l’ambiguïté du mot « VRAI » en réclamant « un vrai service minimum d’accueil lors de la manifestation du jeudi 23 septembre ».
Et précisant une évolution exigée (nous voulons…) : un accueil des enfants entre 8h30 et 16h30 ; repas de midi compris.

Mais qu’est-ce qu’un VRAI service minimum d’accueil ?

S’il le mot VRAI doit être compris dans le sens de « VÉRITABLE », alors il convient de se référer aux textes légaux qui ont défini ce qu’est le « service minimum d’accueil » et donc à la loi du 20 août 2008 mentionnée plus haut.
Or, la loi est précise : le service minimum d’accueil concerne uniquement le temps scolaire. Le temps périscolaire (repas et garderie) est donc écarté du champ de cette loi.
Dans cette acception, c’est bien un VRAI service minimum d’accueil tel que le définit la Loi, qui est mis en place à Besançon.

Le mot VRAI doit donc probablement être utilisé dans le sens de « OPTIMUM ». Auquel cas, l’adjectif minimum est de trop : « service minimum d’accueil optimum ».

Il est bien sûr possible pour une commune de faire le choix d’offrir un service d’accueil « en continu »  (le cas de Bordeaux est cité) mais cela ne peut lui être imposé légalement.

On comprend aussi, car pas totalement dupes, qu’au-delà de l’intention louable de vouloir « répondre à l’attente des familles, souvent les plus modestes » un service « optimum » d’accueil aurait le mérite de rendre les grèves plus transparentes… ce qu’une municipalité à majorité socialiste ne recherchera pas….

Concernant les indemnités que l’État verserait aux mairies qui organisent un tel dispositif « optimisé »… la loi instaurant le S.M.A. n’en dit absolument rien.
Elle ne prévoit que la compensation des frais engendrés par la mise en place du service minimum d’accueil durant le temps scolaire. Les frais supplémentaires sont donc à la charge de la collectivité.

Article 9
L’État verse une compensation financière à chaque commune qui a mis en place le service d’accueil prévu au quatrième alinéa de l’article L. 133-4 au titre des dépenses exposées pour la rémunération des personnes chargées de cet accueil.

A ce sujet, Jean-Louis Fousseret précisait dans sa réponse aux premier communiqué de presse de MM. Sassard et Omouri :

(…) Chaque journée de SMA représente un coût de près de 3500 € restant à la charge de la Ville.

L’État ne compenserait-il pas de manière suffisante les dépenses mis en œuvre par les communes pour ce dispositif ? Il serait intéressant d’avoir quelques précisions… n’hésitez pas à utiliser les commentaires pour compléter, enrichir, applaudir, contredire… pour peu que cela soit fait de manière constructive.

Références :

Premier round : pas de service minimum d’accueil pour les enfants de Besançon ?

Vacherie

Voici un extrait du Conseil communautaire de la C.A.G.B. ((Communauté d’Agglomération du Grand Besançon)), du 30 juin 2010 au cours duquel les conseillers communautaires ont débattu du projet de tramway bisontin. Cette séance a été filmée et diffusée en streaming sur le site du Grand Besançon.

Elisabeth Péquignot, élue du Nouveau Centre (Groupe UMP) s’adresse à Jean-Louis Fousseret, Président de la C.A.G.B.

httpv://www.youtube.com/watch?v=7uzSxkwwyQM
© CAGB

Décodage au cas où quelque chose vous aurait échappé…

L’intervention de Mme Péquignot précède celle d’Édouard Sassard (UMP).
Édouard Sassard est une possible future tête de liste de l’opposition pour les élections municipales à Besançon. Il est également le gendre d’Alain Joyandet, alors Secrétaire d’État chargé de la Coopération et de la Francophonie du Gouvernement Fillon.

Jean-Louis Fousseret sait tout cela. On le voit donc tenter de « miner le terrain » avant la prise de parole de celui qui sera peut-être un jour son adversaire aux élections municipales :

Mme PEGUIGNOT : — Je vous pose une question : en tant que citoyen achèteriez-vous une Ferrari au prétexte que tous vos voisins en possèdent une ?

Jean-Louis Fousseret : — Non, Madame. Je ne voyage qu’en jet privé.

Allusion à l’affaire du jet privé loué 116.500 euros afin de permettre à Alain Joyandet d’effectuer un vol aller-retour entre Paris et la Martinique, en mars dernier.  (lire sur le Monde).

Mme PEGUIGNOT : — Sans avoir, sans avoir au préalable vérifié que vos moyens sont en adéquation ? Je vous remercie.

Jean-Louis Fousseret : — Mais j’envisage de rester à Saint-Ferjeux et je n’agrandirai pas ma maison. Ma famille s’y oppose.
Bien, Monsieur SASSARD.

M. SASSARD : — Je vous remercie de la transition. Je vous remercie de la transition classe ! (…)

Nouvelle allusion, cette fois à la seconde affaire qui précédera la démission d’Alain Joyandet, soupçonné d’avoir bénéficié d’un permis de construire illégal pour agrandir la maison qu’il possède à Grimaud près de Saint-Tropez (lire sur le Monde).

Les vacheries en politiques sont monnaie courante. Pour ma part, j’ai trouvé celle-ci un peu facile… et vous ?

Sources :

L’enregistrement vidéo complet de ce Conseil communautaire se trouve sur cette page.  L’extrait commence à 3h31minutes environ.