Dès le premier décembre prochain, alors que les Bisontins auront tous allumé leur chauffage, la Ville de Besançon leur prêtera du matériel de mesure destiné à repérer les fuites d’énergie et les consommations d’électricité.
Dans un contexte où la consommation d’énergie dans les bâtiments et en particulier dans les logements est un enjeu important pour la lutte contre le changement climatique et pour le pouvoir d’achat, connaitre ses dépenses et ses consommations d’énergie dans son logement se révèle de plus en plus prioritaire. (…)
Ces derniers pourront désormais emprunter du matériel de mesures destinés à repérer les pertes d’énergie dans leurs habitations. Ils pourront à partir de ce diagnostic y faire effectuer les améliorations nécessaires et… réaliser des économies. La ville a ainsi fait l’acquisition de 3 caméras thermiques et de 200 wattmètres.
Ce service sera géré par la Direction de la Maîtrise de l’énergie.
Il n’en fallait pas plus pour que l’initiative fasse le tour des médias locaux : le Pays, France 3 Franche-Comté, l’Est Républicain, puis des publications et sites spécialisés dans les questions environnementales : développement durable, Energy Cities et finisse par attirer l’attention des médias nationaux.
Voici le sujet que TF1 lui a consacré dans son 20 heures du 5 novembre 2010.
Reportage diffusé par France 3 Franche-Comté :
Le conseiller municipal en question est Philippe Gonon (Groupe MODEM) qui a accepté de me répondre par courriel :
Question :
Lors du Conseil municipal du 30 septembre 2010, vous avez été le seul à voter contre la mise en place du nouveau service de prêt de matériel de mesures aux Bisontins. Pouvez-vous expliquer les raisons qui vous ont poussé à voter contre ?
Philippe Gonon :
La thermographie n’est pas une science que l’on acquiert par un simple clic sur une camera infrarouge.
Elle demande deux compétences : d’une part, connaitre les techniques de construction des immeubles, les caractéristiques des matériaux … et d’autre part, savoir interpréter les images souvent complexes qui apparaissent à l’écran.
Ensuite, lire une image infra rouge appliquée aux bâtiments demande à la fois une formation et une expérience que seuls des professionnels détiennent.
Enfin, lire une image demande aussi des logiciels capables de mettre en évidence les dysfonctionnements thermiques.
Confier à des particuliers sans formation, la lecture et l’interprétation d’images infra rouge, peut donc être à l’origine d’erreur de diagnostic préjudiciables à la rénovation qui suivra.
J’avais proposé, comme la région de Franche Comté l’a fait avec le programme Effinergie, un partenariat public- privé dans lequel l’analyse est réalisée par des cabinets privés, sélectionnés pour leur compétence, sur une liste arrétée par la région sur des critères précis.
Le succès de ce programme a démontré la justesse de ce point de vue.
La ville de Besancon fait preuve d’une légèreté en n’accompagnant pas les Bisontins dans leur démarche . Le prêt de ce type de matériel , sans un tutorat technique professionnel tant dans la conduite de l’analyse que de l’interprétation des données, risque de conduire d’ici peu à un constat d’échec fort regrettable.
Pour en terminer, quelles conclusions tirer d’un tel audit , quels travaux réaliser ou ne pas réaliser , quel coût de rénovation thermique, quelle précautions prendre, quels pièges éviter?
La solution du simple pret sans accompagnement est une solution mal réflechie, mal pensée, sans connaissance des contraintes liées à ces techniques d’audit.
C’est donc l’utilisation des caméras thermiques et l’exploitation des données qu’elles fournissent qui poserait problème d’après Philippe Gonon.
Dans le dossier de presse nous ne trouvons aucune précision sur la formation dispensée aux usagers lors du prêt. TF1 dans son reportage évoque « 5 minutes d’initiation » et France 3 parle dans cet article d’une « petite formation ».
Il est vrai qu’à la lecture de la notice de la caméra thermique concernée (que l’on trouve sur le site du fabricant), un passage retient l’attention :
On y apprend que les caractéristiques des matériaux doivent être impérativement prises en compte lors des mesures car de cela dépend leur capacité à rayonner de l’énergie infrarouge. Selon les matériaux et revêtements de matériaux, cette capacité de rayonnement diffère et ce paramètre influe sur la détection infrarouge de l’objet par la caméra.
L’utilisateur doit donc être capable d’apporter des corrections à la valeur par défaut de l’appareil lorsqu’il effectue des mesures sur certains objets (notamment réfléchissants ou en métaux non peints).
Cela semble nécessiter une technicité qui ne s’improvise pas.
La courte initiation dispensée aux utilisateurs sera-t-elle suffisante pour apporter cette formation nécessaire ?
Sur l’exploitation des résultats, le dossier de presse de la Ville de Besançon précise que « la gestion de l’analyse des résultats s’effectuera par extraction des images et transfert sur CD ou clé. Muni de ses résultats, l’emprunteur pourra poursuivre ses démarches et sera dirigé vers les professionnels. »
Pas de précision donc sur une aide éventuelle à l’interprétation des résultats apportée les services de la Direction de la Maîtrise de l’énergie de la ville.
Toutefois, dans son article, France 3 Franche-Comté semble savoir que « les résultats seront analysés par les services de la ville et de l’agglomération bisontine. Les personnes seront également orientées vers l’Espace Info Energie ou d’autres experts« .
Je transmets dès aujourd’hui le lien de ce billet au service concerné pour avoir quelques précisions sur ces interrogations concernant l’initiation à l’utilisation des caméras et l’aide apportée à l’interprétation des résultats.
Il reste à souhaiter que ce service aux visées consensuelles et pleinement louables saura se donner les moyens indispensables aux objectifs visés et qu’il ne se limitera à constituer un excellent coup de projecteur médiatique en terme d’image pour la ville de Besançon.
Réponse de Benoît Cypriani adjoint à l’environnement, au développement durable, et à la maîtrise de l’énergie
Comme quoi il ne faut jamais désespérer. Six mois après la publication de ce billet, une réponse arrive enfin.
C’est Benoît Cypriani, lui-même, adjoint à l’environnement, au développement durable, et à la maîtrise de l’énergie, qui m’apporte quelques précisions intéressantes. Je l’en remercie.
Pour ma part, je ne me priverai pas de tester une caméra thermique mais il m’a été expliqué qu’un écart thermique minimal est nécessaire afin que les mesures soient fiables. J’attendrai donc les mois en « -bre ».
Le but du prêt de caméra thermique, c’est que chacun, locataire ou propriétaire, s’il le souhaite, puisse se faire une idée des éventuelles fuites de chaleur. Et pour cela, pas besoin de sortir de polytechnique. Si, en effet, la notice semble compliquée à lire (mais n’est-ce pas souvent le cas, y compris pour un simple chauffe-biberon ?), l’utilisation est très simple. Je vous invite à l’essayer, ainsi que je l’ai fait moi-même. Si l’on a déjà manié un appareil photo réflex, il est vrai que l’on est un peu avantagé.
Mais les explications données par le service qui prête la caméra sont claires, permettent d’éviter les principaux pièges.
Avec cet appareil, vous regardez vos fenêtres, portes et même murs d’un autre oeil !
Mais nous le disons d’emblée, ce tour d’horizon ne remplace pas un audit et cette noble profession à laquelle appartient M. Gonon va au contraire en bénéficier. Il n’est pas question de lui faire concurrence, bien au contraire. Car que va-t-il se passer lorsque celui qui emprunte la caméra va constater des fuites ? Cela, nécessairement, va le faire réfléchir ; il va regarder sa facture de chauffage, son compte en banque. De là, il conclura à la nécessité/possibilité de poursuivre la réflexion et il pourra alors faire appel à un professionnel pour effectuer un diagnostic plus approfondi. Si l’homme est simplement locataire, il sera enclin à transmettre ses impressions à son propriétaire lequel, etc… Bref, et toutes mes excuses pour cette réponse un peu longue (et tardive), ne pas confondre audit et sensibilisation.
Vous découvrez que ce maire et les allies verts ne font QUE de la com.
Un bel exemple ici
Il y a 2 ans que les professionnels font de vraies mesures dans l’immobilier ancien et cet épisode les fait beaucoup rire
Le but du prêt de caméra thermique, c’est que chacun, locataire ou propriétaire, s’il le souhaite, puisse se faire une idée des éventuelles fuites de chaleur. Et pour cela, pas besoin de sortir de polytechnique. Si, en effet, la notice semble compliquée à lire (mais n’est-ce pas souvent le cas, y compris pour un simple chauffe-biberon ?), l’utilisation est très simple. Je vous invite à l’essayer, ainsi que je l’ai fait moi-même. Si l’on a déjà manié un appareil photo réflex, il est vrai que l’on est un peu avantagé.
Mais les explications données par le service qui prête la caméra sont claires, permettent d’éviter les principaux pièges.
Avec cet appareil, vous regardez vos fenêtres, portes et même murs d’un autre oeil !
Mais nous le disons d’emblée, ce tour d’horizon ne remplace pas un audit et cette noble profession à laquelle appartient M. Gonon va au contraire en bénéficier. Il n’est pas question de lui faire concurrence, bien au contraire. Car que va-t-il se passer lorsque celui qui emprunte la caméra va constater des fuites ? Cela, nécessairement, va le faire réfléchir ; il va regarder sa facture de chauffage, son compte en banque. De là, il conclura à la nécessité/possibilité de poursuivre la réflexion et il pourra alors faire appel à un professionnel pour effectuer un diagnostic plus approfondi. Si l’homme est simplement locataire, il sera enclin à transmettre ses impressions à son propriétaire lequel, etc… Bref, et toutes mes excuses pour cette réponse un peu longue (et tardive), ne pas confondre audit et sensibilisation.