Ce jeudi 10 novembre, Besançon accueillera France Inter qui effectuera dans notre ville la 5e étape de son périple mensuel « 12 mois, 12 villes, 12 éclairages« .
Les Bisontins sont flattés – n’allez pas croire le contraire – et les équipes de France Inter seront bien accueillies.
Toutefois, il me semble utile d’éclairer ces gens sur quelques aspects de la vie locale. S’ils savent en tenir compte, leur « rendez-vous en terre inconnue » devrait se passer au mieux, sans anicroche. Chacun pourra alors réintégrer la Maison de la Radio ravi de sa virée bisontine.
Sinon… sinon vous avez sans doute vu Projet Blair Witch ou Délivrance n’est-ce pas ?
France-Intérien, France-Intérienne, lis donc la suite et prends des notes hein… ça pourrait te sauver ton séjour parmi nous.
1. Besançon, tu situeras
Tout d’abord tu es ici :
Et pas du tout là :
Commencer ton émission par : « Vous êtes bien là Briançon !!!? » jetterait un froid certain et recueillerait peu de réponses. A éviter donc.
2. Dans Besançon tu ne t’égareras pas
Pour ça tu dois savoir que le Bisontin moyen est du genre contrariant avec la toponymie.
Regarde par exemple : c’est à l’Hôtel de Ville que se dérouleront les émissions de ce jeudi n’est-ce pas ? Eh bien, si tu demandes à un quidam de t’indiquer la Mairie, celui-ci t’enverra à un tout autre endroit.
A Besançon, l’Hôtel de Ville c’est l’Hôtel de Ville et la Mairie, bah… c’est la Mairie quoi.
Mais tu n’es pas au bout de tes peines, même si tu demandes ton chemin correctement. Démonstration :
[quote]- Pourriez-vous m’indiquer l’Hôtel de Ville s’il-vous-plaît ? (c’est bien connu, les gens de la Maison de la Radio sont très bien élevés)
– Oui bien-sûr. Traversez-voir ((Nous reparlerons de ce « voir » étrange un peu plus loin)) la place du Marché. Après suivez-voir ((Même syndrome)) la Grande Rue et vous allez arriver sur la place Saint-Pierre. C’est là.
[/quote]
Serviable le Bisontin. Mais très conservateur toponymement parlant. La place du Marché se nomme en fait « place de la Révolution » depuis belle lurette.
Quant à la place Saint-Pierre, ça fait à peine plus de cinquante ans qu’elle s’appelle « place du 8 septembre 1944 » … mais non ça ne rentre pas. Rien à faire.
Donc, note bien : place Saint-Pierre = place du 8 septembre…. voilà voilà
Quant à notre fameuse Porte Noire sous laquelle tu ne manqueras pas de passer si tu décides de pousser jusqu’à la Citadelle, tu remarqueras qu’elle est blanche. On est comme ça à Besançon. Quand c’est noir, on dit blanc et quand c’est blanc…
3. L’ennemi de Besançon tu repéreras
L’ennemi c’est Dijon (beurk).
Si tu as déjà observé la rivalité entre Toulouse et Bordeaux, tu retrouveras sensiblement le même amour vache entre Besançon et Dijon. Voisines trop proches et trop éloignées à la fois.
Les habitants de Besançon conçoivent Dijon comme une ville bourgeoise et froide qui n’a de cesse de vouloir siphonner l’économique et administrative moelle bisontine pour n’en laisser qu’une carcasse vide.
Les Dijonnais, eux, ne pensent rien de Besançon. Ils ont pour la plupart une idée peu précise de cette petite ville là-bas, à l’Est, vers la Suisse.
Tu comprendras donc qu’inviter un journaliste dijonnais pour évoquer « Besançon face à la crise » puisse être ressenti amèrement sur les bords du Doubs.
4. Le Bisontin tu traduiras
L’accent du coin, il faut t’y préparer puisqu’en radio il va s’entendre, c’est certain. Sache que plus cet accent est « à couper au couteau » et plus il vient de haut. Du Haut-Doubs pour être précis. Mais si ! tu sais… cette contrée des hauts plateaux qui jouxte la Suisse. C’est là que se trouve Mouthe, ce village glaciaire, véritable « marronnier de l’actu » en période froide. Notre marron glacé à nous.
Pour te préparer au pire, voici un aperçu de l’accent des « gens du Haut ». A visionner et écouter à partir de 1 minute.
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Et puis il y a ces expressions régionales qui ne doivent pas te surprendre. Aller. Je te mets en situation. Tu as 2 heures devant toi et tu souhaites te rendre à la Citadelle. Dialogue :
[quote]- S’il-vous-plaît, je voudrais monter à la Citadelle. En voiture c’est possible ?
– Oh la ! Avec le bordel des travaux de cette saleté de tramway vous n’êtes pas arrivé. Vous avez meilleur temps d’y aller à pied. [/quote]
Dans la réponse de l’autochtone tu auras sans doute remarqué – hormis l’attachement des Bisontins à leur futur tramway – une expression curieuse : « avoir meilleur temps de ».
Elle est tout à fait locale, Doubiste voire Jurassienne. En l’occurrence, elle pourrait être « traduite » par : « Vous auriez plutôt intérêt à y aller à pied ».
Un autre tic verbal très Franc-Comtois : le verbe voir qui suit un autre verbe. Exemple :
[quote]- Regarde-voir dans le frigo si y’a encore du Comté et sors-le-voir.
– Finis-voir ta soupe avant de sortir de table !
– Allume-voir France inter et écoute-voir ce qu’ils disent sur Besançon.
– Lis-voir le billet du Bison Teint si tu veux comprendre quelque chose à ce dialecte étrange. [/quote]
5. A Besançon, certaines gaffes tu ne commettras pas
Là je te préviens, il y va de la qualité de l’accueil que tu recevras chez nous. Les Bisontins et les Comtois en général sont « des bêtes à sang froid ». Ils sont plutôt discrets et peu expansifs. Mais lorsque la moutarde (pas de Dijon, jamais) leur monte au nez… pif ! paf ! pouf !
Fais gaffe quoi. Donc voici des choses à ne pas dire ainsi que quelques sujets à éviter :
En société
- « Besançon dans le Jura »
Nan. Dans le Doubs ! Même si nous sommes effectivement au pied du massif du Jura. - « Alors comme ça vous êtes Besançonnaise ? »
En fait on dit « Bisontine » . - « Vous avez une équipe de foot ? »
Euh oui mais… non. On préfère faire semblant de ne pas en avoir. C’est douloureux. Il n’y a qu’un club de football digne de ce nom dans la région : Sochaux. Et comment dire… Sochaux c’est Montbéliard et… vis à vis de Montbéliard, Besançon est distante et un peu hautaine. A bien y regarder, les Bisontins se comportent un peu en Dijonnais à l’égard des Montbéliardais… - « Y’a un Ikéa ? »
Non. Il est à Dijon (sujet de crispation) - « Une FNAC peut-être ? »
Peut-être oui. Un jour (très ancienne frustration).
Dans la rue
- « Pourquoi y’a un drapeau belge là-haut ? »
Ce n’est pas un drapeau belge ! C’est celui de Besançon. Les Belges sont des copieurs. - « C’est marrant cet aquarium avec le gros truc bleu dedans. Ça sert à quoi ? »
Ce gros truc bleu c’est la Sainte Maquette de notre futur tramway et elle n’est pas dans un aquarium mais dans une châsse. Evitez de blasphémer merci.
Au restaurant
- « Il est bon ce rosé. »
En fait c’est du Poulsard. Un cépage local. - « Votre vin blanc là il est tourné non ? Il est tout jaune et il a un drôle de goût.
Attention : si c’est jaune et que ça sort d’une petite bouteille, c’est du Vin Jaune. Un nectar sacré pour les gens du coin. Respect. - « Le miel là il a un goût d’ail. »
Oui bah c’est de la cancoillotte quoi. - « Je ne reconnais pas le goût du pastis »
Normal : c’est du Pontarlier. - Y’a pas de trous dans le gruyère !
Logique, c’est du Comté… - Et les tapas ?
On doit ce cliché à Victor Hugo qui est né à Besançon et en est définitivement parti à l’âge de six semaines. « Besançon, vieille ville espagnole » écrivit-il plus tard. Mais moi, les bars à tapas, je les cherche encore.
En voiture
- « Allons nous balader sur les routes de Haute-Saône. »
Non ça c’est l’erreur ultime. A moins d’avoir une vocation de grand reporter un brin suicidaire, restez dans le Doubs. Conseil d’ami.
Aller, j’en termine avec ces quelques conseils. Et merci à tous les amis de la Twittosphère bisontine et comtoise (parfois en exil) qui ont apporté beaucoup d’idées à ce petit guide de survie… et bon séjour et bonnes émissions aux équipes de France Inter !
Ah si ! Une dernière chose. Vous en apprendrez beaucoup sur notre ville en allant lire cet excellent billet écrit par mon ami Grugru pour la Désencyclopédie. Attention, ça pique !
A la suite de ce billet
Pascale Clark parle du “Guide de survie à l’usage des équipes de France Inter en terre bisontine“… en plus elle me remercie “du fond du cœur”. Je ne ferai pas le faux modeste. Je suis très fier de ça 🙂
[audio:http://bisonteint.net/wp-content/uploads/2011/11/comme_on_nous_parle10.11.2011B.mp3|titles=Comme on nous parle – Pascale Clark – jeudi 10/11/2011]
Merci à elle ainsi qu’à Collin et Mauduit qui en avait également parlé la veille.
C’était ce jeudi 10 novembre en direct de Besançon.
L’intégralité de son émission est ici.
Excellent !!!!
Ne serait pas renié par Marcel Aymé.
À mettre dans les guides du petit futé
J’adore. Nonobstant la célèbre condescendance bisontine pour la pauvre mais pourtant ORIG!NALE Haute-Patate, le dernier conseil est avisé : j’ai commis la grave erreur, inconsciente que j’étais, d’y poser mes sabots nancéiens il y a 10 ans, et n’ai jamais pu m’en échapper, Vindiou.
Excellent : juste et tordant!
C’est excellent ! Je connaissais pas l’histoire du drapeau Belge (mais bon je suis Jurassien moi :-p
Et l’oscar de la best Epic line revient à :
« Allons nous balader sur les routes de Haute-Saône. » Non ça c’est l’erreur ultime. A moins d’avoir une vocation de grand reporter un brin suicidaire, restez dans le Doubs. Conseil d’ami.
Pour quelle raison découragez vous les gens de venir visiter le paradis qu’est le plateau des mille étangs ? Par jalousie parce que le tour de France évite le Doubs et surtout sa petite capitale ? ?
M’enfin René ! Le Tour de France ne nous épargnera pas cette année. Il y a une étape Besançon-Oyonnax…
Les couleurs sur le drapeau belge sont inversées Le noir est côté mat je crois
Hahaha, énorme^^. Je ne suis pas bisontine, mais par contre le « voir » après tous les verbes est commun à tout le nord est de la France^^ Je suis Lorraine, et on le met partout!
C’est très très bon ! Super article
Article génial, tout est vrai. Il faudrait juste ajouter que tout bon franc-comtois (ou juste bon jurassien ?) qui se respectera prononcera Poulsard => Ploussard !!
« Il est bon ce rosé. »
– En fait c’est du Ploussard. Un cépage local.
– Alors pourquoi c’est marqué Poulsard sur la bouteille ?
Haut-Saônois de naissance, Dijonnais d’adoption, je suis scandalisé par le peu de considération qu’ont les Bisontains et Bisontaines de leurs proches voisins. Méfiez vous d’une alliance… B’sançon est entre les mâchoires d’une paire de tenailles !
On est dans la région Bougogne Franche-Comté. Alors Besançon restera toujours derrière Dijon ! malheureusement !
Peut-être parce qu’ils en ont marre qu’on écorche leur gentilé… BisonTINS et BisonTINES
Sans rancune. 🙂
ah ah
Ah ben question considération tu repasseras! C’est bisontins et bisontines non de non!
Ce Macmich, il a bu ?
C’est vrai que dans le Doubs, y’a que trois grandes villes:
* B’zaaannnçon
* Monbéyââârd
* Pontarrrier !
Il me plait de plus en plus ce garçon !
Merci pour le rire et l’air du pays 😉
ENORME !!
Par contre, y a pire que l’accent du Haut-Doubs : l’accent de Montbéliard.
A couper au couteau…
Et n’y voyez pas la parole d’une Bisontine qui regarderait Montbé de très très haut !
et pire que Montbé : Audincourt ! parole de Belfortain 😉
Bravo Bison, et merci ♥!
Mais pourquoi les Bisontins ne savent pas s’arrêter, tout était bien sauf le dernière phrase. Les Dijonnais vont finalement pâle figure devant le peu de considération pour la Haute-Saône qui certes est paumée mais pour des Parisiens elle constitue la vraie campagne. Dénigrement, dénigrement quand tu nous tiens……..
Heureusement que Mehdi et Badrou ne connaissent pas la Haute-Saône, enfin de toute façon à part Joyandet personne n’a accès à Twitter en Haute-Saône 🙂
Sans rancune, c’est trop drôle.
j’ai beaucoup ri !
Surtout :
« Y’a un Ikéa ? »
Non. Il est à Dijon (sujet de crispation)
« Une FNAC peut-être ? »
Peut-être oui. Un jour (très ancienne frustration).
Avant c’était pareil pour H&M. Maintenant on en a un, mais bon, pas au centre-ville, ce serait trop facile !
Un excellent billet ! C’est bien senti !
Je m’oppose juste à ce qui est dit sur la haute-saône, notre Texas franc-comtois, juste parce que je viens de ce département tout de même !!!
Bravo pour ce billet, les france-Interiens vous remercierons !
Excellent.
On me signale juste qu’il n’y a pas de trous dans le gruyère non plus. Dans l’emmental, oui.
normal c’est le comté suisse le gruyère les trous s’est dans l’emmental!
Franc-comtois exilé depuis 20 ans chez les fous ( Paris intra-muros ) … Quelle drôlerie et quel bol d’oxygène 🙂 Merci.
Bon, allez, on fait la paix : Comtois rend-toi !
P.S. Macmich est une (ma) femme !
Tout est très juste est bien trouvé : en tant que Bisontine expatriée je me reconnais parfaitement.
Manque plus que le « Bezak » !
Par contre le billet m’a fait bcp rire en l’entendant à la radio, et me déçoit un brin à la lecture : je trouve la manière de présenter un peu trop négative, rabaissant les gens
Ce splendide accent franc-comtois c’est vrai qu’il peut bien surprendre ceux qui débarquent. J’ai remarqué aussi de grandes similitudes avec certains dijonnais, comme le fameux « roh’hein dieu! » par exemple. J’en arrive à me demander si les frontières de cet accent ne sont pas beaucoup plus larges…
et vive la cancoillotte!!!
Blog découvert en écoutant France Inter.
Bravo, excellent !
Tristan.
Presque parigo, presque tête de Morteau.
Rien n’est dit sur l’emploi du verbe vouloir à la place de « aller ». Par exemple : « ça veut aller » pour « ça va aller » ou « je veux y dire » pour « je vais lui dire ».
Et, plus grave, on ne sait toujours pas si les Franc-Comtois « font » ou « prennent » de l’essence…
Si, ça on le sait : les franc-comtois « prennent » de l’essence.
« Tu comprendras donc qu’inviter un journaliste dijonnais pour évoquer « Besançon face à la crise » puisse être ressenti amèrement sur les bords du Doubs. »
…sectarisme quand tu nous tiens…
Excellent, de l’humour enfin que ça fait du bien en ce moment!!
Il manque juste dans les expressions que j’ai découvert en arrivant dans la région
» rien que tout seuls les deux » pour dire » rien que nous deux » et la lumière qui » claire » ….Et Pontus pour PONTARLIER
Ouaip moi qui vient du nord j’ai remarqué exactement les memes expressions !!! allez j’attend sur vous ^^
France Inter était là?
Ah bon, moi j’ai personne vu!
Faut bin dire que j’passais la soirée à ramburer le frigo……
Précisions la cancoillote à l’ail uniquement tu dégusteras…
différencier le vieux du jeune comté tu devras
la devise de la franche comté et son histoire tu apprendras !
Je pense que LA Pascale, LE Colin et LE Mauduit y se sont pas ennuyés parce ‘qu’à B’sac question troquets y’a beau faire!
copie de poncifs archi-connus bref c’est d’un banal
Dans la même veine, je pense que nous aurions également pu prévenir nos compatriotes de France Inter que les pierres tombales qui ornent la place Pasteur sont en réalité des bancs publics…
Excellent ! Par contre arrête voire de dire que voir c’est un verbe utilisé après un autre verbe, en fait c’est une conjonction, synonyme de « donc ». Et ça s’écrit avec un « e ».
Enfin bref hormis ce point de grammaire, tout est juste, y compris le point sur la Haute-Patate (Haute-Saône pour les incultes ».
Un haut-doubiste.
Au pays de la France « profonde » et provinciale, le haut-doubiste serait-il roi ?
Que du bonheur pour une franc-comtoise, ex étudiante bisontine exilée dans le vent glacial du CHNORD. A titre de comparaison, je préfère de loin l’humour de Bison teint à celui de Dany Boon dans son regard porté sur le nord.
Génial ! J’ai tellement ri en lisant votre article, étant jurassienne. Les expressions mentionnées n’avaient rien de choquantes et grâce à vous je me rends compte pourquoi les habitants de Toulouse me comprennent mal parfois… Excellent papier, profitez bien de la Franche-Comté !
« Allons nous balader sur les routes de Haute-Saône. »
Non ça c’est l’erreur ultime. A moins d’avoir une vocation de grand reporter un brin suicidaire, restez dans le Doubs. Conseil d’ami.
===> Aaaah !! Attention faut pas parler comme les journalistes de France Inter !!! Décidément, on est toujours le « coin à suicide » de quelqu’un ! Très de blagounette, c’est un peu du revu ça!
Ah ben dites-donc « voir », je découvre aujourd’hui ce site (ou bien est-ce un blog ?), super, mais pourquoi n’y trouve-je que des messages de novembre 2011 ? Ca marche toujours, j’espère, « ou bien » ?…
Tordant…! 😀 et tellement bisontins!