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On m’a sondé. Enfin presque…

Petite anecdote du jour.

Dring dring (les sonneries modernes sont difficiles à restituer sous forme d’onomatopées)

– Oui, allo ?

– Bonjour, je travaille pour l’IFOP et j’effectue un sondage sur divers sujets d’actualité. Est-ce que vous accepteriez de répondre à quelques questions ?

– Pourquoi pas [pour une fois qu’on me sonde]…

– Sachez d’abord, que certaines questions portent sur vos opinions personnelles et l’IFOP s’engage à ce que cela reste confidentiel et respectueux de la loi Informatique et Libertés.

– C’est parfait.

– Alors tout d’abord, quelle est votre année de naissance ?

– [je lui ai dit mais pas à vous, na !]

– Quel est le dernier diplôme que vous avez obtenu ?

– [idem]

– Quelle est le profession du chef de famille ?

– Euh, je ne sais pas moi. On est deux en fait dans le couple. Vous voulez les deux professions ?

– Non, seulement celle du chef de famille.

– Mais il n’y a pas de chef de famille, désolé. On est en 2013…

– Bah oui mais ce sont les critères de l’INSEE…

– Alors on va en rester là. La profession du sondé d’accord, mais si je donne mon avis personnel et qu’au final ça compte comme celui d’un chef de famille qui engage le couple, il est faussé d’avance votre sondage. Désolé mais j’arrête là. Faut évoluer.

Au revoir poli.

 

C'est vrai quoi. C'est qui l'chef ?

C’est vrai quoi. C’est qui l’chef ?

 

 

J’avoue que la notion de « chef de famille », balancée comme ça soudainement, m’a semblé surgir d’un autre âge.  Alors, après ce court entretien, j’ai effectué une rapide recherche sur le site de l’INSEE et sur Wikipedia. Il semble que la notion de « chef de famille ou de ménage » a du plomb dans l’aile depuis pas mal de temps mais que l’INSEE évolue beaucoup plus lentement dans ses sondages, que la prédominance masculine est encore à l’ordre du jour et que l’IFOP est encore bien ancrée dans le XXe siècle….
Pas sûr qu’avec ce genre de notion archaïque servant toujours de référence aux sondeurs, on fasse efficacement évoluer l’égalité entre hommes et femmes (ou femmes et hommes c’est selon).

Personne de référence du ménage
En 1982, à la notion de « chef de ménage », dont la connotation était jugée trop hiérarchique, on a substitué celle de « personne de référence du ménage ». A chaque ménage correspond une personne de référence et une seule.
Elle est déterminée de la manière suivante. La personne de référence du ménage est déterminée à partir des seules 3 personnes les plus âgées du ménage. S’il y a un couple parmi elles, la personne de référence est systématiquement l’homme du couple.
Si le ménage ne comporte aucun couple, la personne de référence est l’actif le plus âgé (homme ou femme), et à défaut d’actif, la personne la plus âgée. (source : INSEE)

 

Depuis les années 1960, en France, le législateur essaie de promouvoir l’égalité des sexes, allant ainsi à l’encontre de la tendance « naturelle » de la société, qui ne la réalise pas spontanément1.
Après avoir remplacé le titre « Chef de famille » par celui de « Personne de référence », tout en gardant la prédominance masculine, l’INSEE a attendu 2004 pour commencer à intégrer l’égalité des époux dans le contenu de ses sondages. (source : Wikipedia)

Les rares filles des rues de Besançon…

Impossible de manquer l’information : ce 8 mars, comme tous les 8 mars, c’est la Journée Internationale des Droits des Femmes. Débauche d’actions symboliques, de grandes déclarations d’intention. Les candidats à l’élection présidentielle ne sont évidemment pas les derniers à se la jouer « féministes d’un jour« . Bonne conscience.

À Besançon, un programme spécial a été concocté sur plusieurs jours. On a même eu droit à une affiche un peu bizarre.

En me baladant dans Besançon aujourd’hui, j’ai eu une idée rigolote, intéressante ou stupide, c’est au choix. L’idée de faire l’inventaire des noms des rues, avenues, places, squares… de Besançon. De trier ceux qui rendent hommage à une personnalité. Puis de faire le tri entre les hommes et les femmes.

La liste des noms des rues et voies bisontines, je l’ai trouvée facilement sur un plan. Il a fallu ensuite repérer les personnages et faire quelques recherches pour ceux dont le sexe n’est pas induit pas un prénom. Certains noms m’ont échappé mais la plupart ont pu être « sexués ».

Le bilan est absolument édifiant. Est-ce surprenant ?
Vous pouvez le visualiser dans le fichier PDF ci-dessous. J’ai fait au plus simple. J’ai surligné en bleu : les hommes et en rose : les femmes.

Bilan : 27 femmes pour 399 hommes

À peine plus de 6 % des rues, places, squares bisontins… baptisés du nom d’un personnage célèbre, portent celui d’une femme.

Et encore, deux femmes partagent cet honneur avec un homme (rue Pierre et Marie Curie, espace Georges et Adèle Besson).

Faut-il en déduire que la ville de Besançon est particulièrement machiste dans le choix de ses noms de rues ?

Évidemment non. Le constat aurait été sensiblement le même pour la plupart des villes françaises. C’est juste que voyez-vous, l’histoire enseignée a pendant longtemps fait peu de cas du rôle des femmes. Hormis Jeanne d’Arc, vous trouverez bien dans les manuels d’Histoire quelques courtisanes célèbres mais sinon… rien.

Il faut dire que l’Histoire a longtemps fait la part belle à la chose militaire qui était le métier de mecs par excellence. À Besançon, beaucoup de voies publiques portent des noms de généraux et autres capitaines.

Sur ce sujet, on peut lire ce rapport du Conseil Économique et Social de 2004 baptisée « Quelle place pour les femmes dans l’Histoire enseignée ? ».

Son introduction en dit déjà beaucoup :

[quote]Il subsiste pourtant bien des zones muettes et, en ce qui concerne le passé, un océan de silence, lié au partage inégal des traces, de la mémoire et, plus encore, de l’Histoire, ce récit qui a si longtemps oublié les femmes comme si, vouées à l’obscurité de la reproduction, inénarrables, elles étaient hors du temps, du moins hors évènements.[/quote]

A noter que sur les 19 rames du futur tramway de Besançon, 5 porteront le nom du femme. Y’a du mieux !

On ne fera pas la révolution en un billet… donc je me contenterai pour aujourd’hui — après ce constat — de vous donner quelques informations recueillies sur les 27 veinardes qui ont donné leur nom à des lieux bisontins. L’essentiel des informations vient de Wikipedia. N’hésitez pas à compléter (utilisez les commentaires).

  • Madeleine Brès (1842 – 1921) : elle fut la première femme à obtenir le diplome de docteur en médecine.
  • Camille Charvet (Besançon, 1881 – 1944) : scientifique, membre de la Ligue des Droits de l’Homme, résistante. Elle meurt en déportation à Auschwitz.
  • Colette (1873 – 1954) : romancière. Elle posséda une maison aux Montboucons à Besançon.
  • Marie-Lucie Cornillot : elle fut conservatrice du Musée des Beaux Arts et d’Archéologie de Besançon. Je n’ai pas d’autres informations.
  • Marie Curie (1867 – 1934) : physicienne française d’origine polonaise. Elle reçut deux prix Nobel.
  • Marcelle de Lacour (Besançon, 1896 – 1997) : musicienne claveciniste.
  • Sonia Delaunay (1885 – 1979) : artiste peintre.
  • Françoise Dolto (1908 – 1988) : pédiatre et psychanaliste. Elle se consacra à la psychanalyse de l’enfance.
  • Angélique Marguerite du Coudray Le Boursier (1712 – 1792) : première professeur de la discipline des sage-femmes.
  • Anne Franck (1929 – 1945) :  adolescente allemande juive, elle écrivit un journal intime, rapporté dans le livre « Journal d’Anne Frank », alors qu’elle se cachait avec sa famille et quatre amis à Amsterdam pendant l’occupation allemande durant la Seconde Guerre mondiale dans le but d’éviter la Shoah. Après deux ans passés dans ce refuge, le groupe est trahi et déporté vers les camps d’extermination nazis. Sept mois après son arrestation, Anne meurt du typhus dans le camp de Bergen-Belsen.
  • Sophie Germain (1776 – 1831) : mathématicienne française
  • Olympe de Gouges (1748 – 1793) : femme de lettres française, devenue femme politique et polémiste. Auteure de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, elle a laissé de nombreux écrits en faveur des droits civils et politiques des femmes et de l’abolition de l’esclavage des Noirs.
    Elle est devenue emblématique des mouvements pour la libération des femmes, pour l’humanisme en général, et l’importance du rôle qu’elle a joué dans l’histoire des idées a été considérablement estimée et prise en compte dans les milieux universitaires.
  • Marguerite Marchand : aucune information. Si vous en avez, je suis preneur.
  • Louise Michel (1830 – 1905) : militante anarchiste et figure majeure de la Commune de Paris. Première à arborer le drapeau noir, elle popularise celui-ci au sein du mouvement anarchiste.
  • Maria Montessori (1870 – 1952) : Elle est internationalement connue pour la méthode pédagogique qui porte son nom, la pédagogie Montessori.
  • Berthe Morisot (1841 – 1895) : artiste-peintre française liée au mouvement impressionniste.
  • Anne de Pardieu (1869 – 1926) : artiste sculpteur française. Née Anne de Chardonnet, elle était la fille de Hilaire de Chardonnet, ingénieur bisontin inventeur de la soie artificielle.
  • George Sand (1804 – 1876) : romancière et femme de lettres
  • Simone Signoret (1921 – 1985) : actrice française
  • Marguerite Syamour (1857 – 1945) : née Marguerite Gagneur. Sculpteur engagée dans la défense de la République (laïcité, féminisme et pacifisme).
  • Jeanne-Antide Thouret (1765 – 1826) : une religieuse française, fondatrice de l’ordre des « Sœurs de la Charité de Besançon ».
  • Sophie Trébuchet (1772 – 1821) : mère de Victor Hugo.
  • Elsa Triolet (1896 – 1970) : femme de lettres et résistante.
  • Suzanne Valadon (1865 – 1938) : peintre française. Elle est la mère du peintre Maurice Utrillo.

Et le lendemain dans l’Est Républicain (9/03/2012) :