Mercredi 26 juin 2013, le dernier carré bisontin des « anti mariage pour tous » se réunissait sous le kiosque Granvelle sous haute protection policière pour affirmer sa désobéissance civile vis à vis de la loi instaurant le mariage homosexuel.
La veille, sur le compte Twitter des « Veilleurs » de Besançon, on montrait patte blanche. Histoire d’anticiper la contre-manifestation à laquelle les « Réveilleurs » de Besançon avait appelé.
Comme si la première des violences, en République, n’était pas le refus de l’égalité des droits pour tous…
Bilan de la soirée : autant de veilleurs que de réveilleurs. Et surtout une présence policière tournée du côté des seconds afin que leur laïcité exacerbée ne viennent surtout pas perturber la prière de rue autorisée par le Préfet.
Dans l’Est Républicain du lendemain, on peut lire cet extrait d’un article consacré à cette veillée :
Est Républicain du 27/06/2013
Je vous ai surligné mon passage préféré. Le coup de l’ami homosexuel qui est totalement d’accord pour avoir moins de droits que les autres citoyens ; elle est bien bonne celle-là. On l’a déjà tellement entendue, y compris de la bouche de ceux qui voudraient devenir les « meilleurs d’entre nous » :
Revenons à Raymond Balmes, l’organisateur de cet instant d’homophobie décomplexée camouflé en charmante veillée de prière au coin du feu de la bougie.
À la lecture des inepties que ce monsieur a confié à l’Est Républicain sur l’homosexualité et les homosexuels, il apparaît évident qu’accorder l’égalité des droits aux Raymond n’est vraiment pas une solution. Il y a sans doute d’autres manières d’accueillir ces gens dans la société.
Les Raymond n’y sont évidemment pour rien s’ils se prénomment ainsi. Ce sont des victimes, parfois blessées violemment dans leur identité.
Faut dire que c’est pas simple de s’appeler Raymond, et cela explique sans doute leur différence dans la relation à l’autre. Alors les autoriser à se marier, à faire des gosses et tout ça, non. D’ailleurs la majorité des Raymond n’y est pas favorable.
J’ai des amis prénommés Raymond qui pensent exactement la même chose que moi, alors bien malin celui qui me traitera de raymondphobe !
Ce samedi 2 février 2013, les opposants au projet de « mariage pour tous », manifestaient à Besançon.
Parmi eux, une délégation d’élus et cadres UMP locaux. Et puis aussi l’ancienne député UMP de la 2e circonscription du Doubs – Françoise Branget – battue en juin dernier par Barbara Romagnan (PS).
Aujourd’hui Mme Branget ne conserve qu’un seul mandat électif : elle est conseillère régionale de la région Franche-Comté.
Françoise Branget à la « manif pour tous » du 2 février 2013 à Besançon (photo : Loïc Ponce)
Voici une photographie prise sur le parcours de la manifestation. On y aperçoit des élus de droite Bisontins (Michel Omouri notamment) et de la région.
France 3 Franche-Comté donne une liste non exhaustive des élus présents. Parmi eux se trouve Françoise Branget (béret rouge).
Des élus et anciens élus de droite à la manif pour tous (2 février 2013)
Zoomons un peu sur Mme Branget car il y a comme un détail qui cloche. Tiens tiens…
Comment ? Vous ne remarquez rien ? Alors voyons cette autre photographie :
Des élus de droite à la « manif pour tous » du 2 février 2013 à Besançon
Nous sommes ici place du 8 septembre (place Saint-Pierre si vous préférez). Derrière cette banderole, nous retrouvons Françoise Branget auprès d’autres élus. Sans doute des maires car la plupart portent l’écharpe tricolore.
Et voilà donc Mme Branget. Elle arbore un sourire radieux et… l’écharpe tricolore, elle aussi.
Serait-elle maire ? Non. Adjointe au maire ? Non plus.
Elle n’est plus conseillère municipale de Besançon depuis qu’elle a été élue conseillère régionale de Franche-Comté en mars 2010.
Est-ce au titre d’élue régionale qu’elle porte l’écharpe tricolore ? Certainement pas puisque le port de l’écharpe tricolore par les conseillers généraux et régionaux n’est tout simplement pas autorisé.
Voyez à ce sujet, la réponse que le ministre de l’Intérieur apporta à une question que le député Lionnel Luca (alors UMP) lui adressa en 2010 à l’Assemblée.
Extrait :
Aucun texte législatif ou réglementaire n’autorise le port d’écharpes tricolores (bleu, blanc, rouge) par les conseillers régionaux et les conseillers généraux à l’occasion des cérémonies officielles. Le port de telles écharpes par des élus n’en ayant pas le droit constitue une usurpation de signes, et est passible des sanctions prévues par l’article L.433-14 du code pénal […]
Mystère mystère… observons une photographie plus lisible prise à quelques minutes de la précédente :
Et approchons-nous un peu :
Françoise Branget porte l’écharpe tricolore avec la bande rouge près du col. Seuls les parlementaires (députés et sénateurs) portent l’écharpe comme cela. Les maires la portent avec la bande bleue en haut.
Problème de taille : Madame Branget n’est plus député depuis le mois de juin dernier.
Alors ? Un privilège d’ancien parlementaire peut-être ? À la manière de cette coutume un peu ridicule consistant à donner ad vitam æternam du « Monsieur le Président » ou « Monsieur le Premier ministre » aux anciennes gloires de notre République ?
Que nenni : l’écharpe tricolore est l’un des insignes officiels de la fonction de député (ou de sénateur). L’écharpe lui est remise avec « son kit d’accueil » lors de son arrivée à l’Assemblée Nationale. Lorsqu’un député perd son mandat, il rend son écharpe tricolore. Il n’a alors plus le droit de porter cet insigne. Ni plus ni moins que le quidam lambda. Aucune coutume républicaine ne l’y autorise.
Que risque Françoise Branget ?
Premièrement, notre ancienne député risque le rouge de la honte. Celui qui vient aux joues du gamin qui se fait prendre la main dans le pot de confiture. En l’occurrence, la situation est nettement plus pathétique que celle de notre garnement : voilà une ancienne député continuant à s’y croire et allant jusqu’à usurper un insigne républicain rattaché à une fonction pour laquelle elle n’est plus mandatée.
Un cas de « déni d’élection perdue » qui devrait passionner plus d’un psychologue.
Deuxième risque et pas des moindres puisque c’est l’article 433-14 du Code pénal qui régit ce type de situation. Et il n’y va pas avec le dos de la cuillère :
Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende le fait, par toute personne, publiquement et sans droit :
De porter un costume, un uniforme ou une décoration réglementés par l’autorité publique ;
D’user d’un document justificatif d’une qualité professionnelle ou d’un insigne réglementés par l’autorité publique ;
D’utiliser un véhicule dont les signes extérieurs sont identiques à ceux utilisés par les fonctionnaires de la police nationale ou les militaires.
Évidente ironie d’une situation dans laquelle on se proclame « gardiens du Code civil » tout en foulant au pied le Code pénal.
On attend maintenant les réactions courroucées des Jeunes UMP du Doubs toujours prompts à réagir lorsqu’un symbole républicain est ainsi bafoué…
Pour aller plus loin :
Voici un courrier que le Préfet du Gard adressait en 2011 aux maires de son département afin de leur rappeler les conditions strictes de port de l’écharpe tricolore ;
Qui peut porter l’écharpe tricolore et dans quelles circonstances ? sur Wikipedia.