Archives de catégorie : Mots d’humeur

Feu le sujet végétal majestueux du 6 rue de la Madeleine

— Monsieur Teint !

— Ah ! Bonjour Madame Durand !

— Bonjour Monsieur Teint. Excusez-moi de vous importuner mais vous pourrez peut-être m’aider. Voilà, j’ai reçu une lettre de la mairie et je ne comprends pas tout. Mes vieux yeux y sont sans doute pour quelque chose mais c’est surtout qu’il y a des phrases bizarres…

— Si je peux vous être utile Mme Durand… Faites-moi voir cette lettre…

— Vous étiez tout de même au courant des travaux qui vont commencer au 6 rue de la Madeleine ?

— Oui oui. Ça j’ai bien compris et je sais que ça ne va pas tarder. Le chantier et tout ça. C’est la suite qui m’échappe. J’ai surligné certains passages. Là voyez, ils écrivent :

Le projet initial prévoyait le maintien du sujet végétal majestueux dans la grande cour.
Néanmoins, un diagnostic mené par l’ONF a démontré la présence de champignons créant un risque de rupture.
Compte tenu de ce diagnostic, il sera donc finalement abattu et remplacé par un nouveau sujet d’envergure qui pourra s’épanouir et recréer une ambiance végétale unique dans cet espace privilégié du quartier Battant.

— En effet, c’est alambiqué… Mais je pense qu’on peut le dire plus simplement, sans tourner autour du pot. Tenez :

Le projet que l’on vous a présenté promettait de conserver le grand et magnifique arbre qui est dans la grande cour.
Néanmoins, un diagnostic mené par l’ONF a démontré la présence de champignons qui vont grandement faciliter les affaires du promoteur de ce projet immobilier. Promoteur pour qui cette saloperie d’arbre était sans doute une vraie plaie en plein milieu de son chantier avec tous les engins qui vont devoir y circuler pour construire au plus vite ces immeubles qui vont lui rapporter plein de pognon.
Compte tenu de ce diagnostic et de ces intérêts qu’il convient de satisfaire, l’arbre sera donc finalement abattu et remplacé par un arbuste qui grandira lui aussi, si si. Et dans 50 ans vous verrez ça aura de la gueule.

— Alors ils vont le couper notre grand arbre… Comme son voisin le conifère qu’on savait déjà condamné. Et ils nous préviennent la veille évidemment…

— Oui Madame Durand… Il ne faut pas laisser aux riverains le temps de pétitionner, vous pensez bien.

— Vous le connaissez M.Teint ce dicton :  « Qui veut noyer son chien l’accuse d’avoir la rage » ?

— Oui Mme Durand. La rage ou bien… des champignons n’est-ce pas ?

Madame Durand m’a rappelé en fin d’après-midi. Le conifère a été débité aujourd’hui.
Son voisin, le « sujet végétal majestueux » dont on avait promis le « maintien » aux riverains de la cour. Son voisin attend maintenant son tour.

Au passage si vous aviez flashé sur cette image bucolique et arborée quand vous avez réservé l’un des futurs appartements du Clos Chapelaine (ah, ces petits noms ruraux pour sonner rustique), il va falloir vous faire une raison : vous avez acheté un grand et magnifique arbre mort.

Et le lendemain :

BesaQ la chaude

Oui oui le froid est là. On sait ça. Le gel, la glace, le verglas, les canalisations qui pètent et les fontaines transformées en banquises miniatures.
Et pourtant, Besançon n’a jamais été aussi chaude. Limite chaudasse.

Tout a commencé avec le plus respectable et le plus âgé d’entre nous. J’ai nommé Victor Hugo – 210 ans au compteur et toujours vaillant. Le plus célèbre des Bisontins s’affiche depuis le début du mois de février en grand format dans la ville. Et diantre ! L’une des ces affiches est comment dire… whoua !!!

Pour illustrer Hugo « l’homme engagé », on a donc choisi une citation extraite… d’une chanson de France Gall (de Michel Berger pour être plus précis).
J’aime bien ce décalage. Ça nous décrispe un peu dans notre rapport à Victor Hugo, et ça c’est nouveau.
Mais là où cette affiche devient franchement surprenante, c’est qu’un martinet à lanières de cuir illustre le tout !

sado-maso ?

Alors quoi ? La Ville de Besançon nous vend un Victor Hugo coquin voire sado-maso ? Nan ??? Comme vous y allez ! Il s’agit plus probablement d’une allusion au combat de l’écrivain en faveur des droits des enfants. Si hein ?
Oui. Mais voilà : aujourd’hui le martinet est plutôt connoté « jouet de grands » et au passage tant mieux s’il l’on n’en vend plus pour corriger de pauvres gosses.

Bref, je dois avoir l’esprit tordu mais…  Et si… et si tout ça n’était en définitive qu’un « teasing » un brin culturel pour faire monter la fièvre avant… le Salon de l’Érotisme – salon qui se déroulait ce week-end à Besançon ?
Mmmmm…. d’ailleurs que voit-on sur le site de l’Office du Tourisme de Besançon ?
On voit notre Victor et le Salon de l’Érotisme se mêlant complicemment complaisamment dans des intérêts publicitaires croisés :

Ah ! L’affiche du Salon de l’Érotisme ! C’est un euphémisme de dire qu’elle ne fait pas dans la finesse. Voyez un peu la bibite qui vous fait coucou, si c’est pas mignon :

Au passage, faudrait penser à changer le nom de ce salon, juste pour être raccord avec le contenu : Salon du Q ou du porno ce serait plus honnête non ? Bah oui l’érotisme ce n’est pas la quéquette. C’est la suggestion de la quéquette ! J’aurais pu bosser pour Révillon moi.

Arf ! Définitivement, je préfère mon Totor avec son martinet à lanières. Au moins lui nous vend du rêve, ou pas. Question de goût.

Un complot ?

Alors quoi ? Un complot de la sphère politico-médiatique en faveur des intérêts capitalo-dévergondés du Salon de l’Érotisme ? C’est bien possible oui ! Pour preuve cette affichette que l’Est Républicain a essaimée un peu partout dans la ville ce vendredi – veille du salon. Comme par hasard.

Le message est à peine subliminal… à peine :

Heureusement : il nous reste la tendresse… après cette débauche de sexe.

Un poutou ça vous tente ?

Il faut bisontiner le soldat Hugo !

Ce texte est l’adaptation d’une chronique que j’ai faite pour « La seule émission qui n’a pas de nom » sur Radio Bip. Vous pouvez l’écouter grâce à ce lecteur. L’émission intégrale avec Ranok et Michel23 est à écouter sans modération ici : http://pseudoblog.free.fr/?p=903

[iframe http://w.soundcloud.com/player/?url=http%3A%2F%2Fapi.soundcloud.com%2Ftracks%2F35933326&show_artwork=true 550 166]

C’est bien connu, Victor Hugo est né à Besançon le 26 février 1802. Il aura donc 210 ans le 26 février prochain. Alors tous en chœur :

Joyeux anniversaire Victor ! Joyeux anniversaire Victor ! Joyeux aaaaaaanniversaire Victor ! Joyeux AN-NI-VER-SAIRE !

Sauf que Victor est mort… Il y a déjà bien longtemps vous savez. Mais peu importe car les illustres ne meurent jamais vraiment. Chaque « année en 2 » nous en apporte la preuve à Besançon.
Ces années-là nous offrent l’occasion de décongeler Victor et de sortir de son musée de cire cet écrivain fameux qui nous a fait l’immense honneur de naître chez nous, dans notre cité. Quoi de plus normal ?

Il faut cependant  reconnaître que la naissance bisontine du grand homme nous pose un épineux problème, puisque précisément – nous n’avons jamais vu Victor Hugo « le grand homme » dans nos murs. Nous n’y avons aperçu que Totor – le nourrisson. Et ce fut on ne peut plus furtif.
À peine né – au hasard d’un passage en garnison de Hugo père – soldat de profession – à peine né et déjà reparti vers le destin qu’on lui connait. Et Victor une fois parti, n’est plus jamais revenu. Jamais.

En résumé et pour faire simple : l’un des plus fameux écrivains de tous les temps est né à Besançon mais il n’a fait qu’y brailler et y téter sa mère.
Hugo le barbu, Hugo l’auréolé de gloire littéraire et politique, cet Hugo-là nous a snobés. Vexant.

Pourtant les Bisontins n’ont pas été rancuniers. Ils ont célébré leur glorieux natif comme il se doit : ils lui ont érigé des statues, ont offert son nom à sa place natale et vous rencontrerez l’enseigne « Victor Hugo » un peu partout dans la ville et sur tout et n’importe quoi : restaurant, cinéma, agence immobilière, montre de luxe, gâteau, collège, lycée et bientôt bientôt sur une rame du tramway tant attendu, tant espéré, tant réclamé par les Bisontins.

« Mais ça ne suffit pas ! Il faut faire plus ! » clame en substance Jean-Louis Fousseret dans le BVV de février qui comporte un encart spécial Victor Hugo.
J’en profite au passage pour rappeler que les trois lettres BVV signifient « Besançon Votre Ville » et pas du tout « Besançon Ville de Vieux » comme je l’ai lu cette semaine. Certaines personnes sont d’une méchanceté…vraiment.

Voici dont les mots exacts de notre maire. Il répond à une question posée par un journaliste du BVV (tiens, en voilà un bel oxymore).

Qu’ont en commun l’action de la Ville et les idées de Victor Hugo ?

Victor Hugo est l’écrivain français le plus connu au monde, sa renommée est immense. J’estime que les idées et la philosophie d’Hugo sont toujours d’actualité. Nous nous devons de l’associer à l’image de la ville, car sa notoriété contribue à notre attractivité touristique. (…)

L’essentiel est dit. Il faut associer Victor Hugo à l’image de la ville, pour ses idées politiques et philosophiques évidemment (ça c’est fait) mais aussi et surtout pour les retombées touristiques tant espérées.
Vauban on l’a fait et nos rues n’ont pas été envahies par les hordes touristiques UNESCO’mpatibles promises.  Les frères Lumière on en a fait cadeau à Lyon, Proudhon et Fourier faut pas déconner non plus et Tristan Bernard n’est-ce pas, il n’y a que les lecteurs assidus des citations pour papillotes qui le connaissent encore…
Donc on va mettre le paquet sur le Totor et là ça va péter vindjieu !

On peut lire aussi dans le BVV :

Dix ans après la célébration du bicentenaire de sa naissance, la Ville de Besançon a décidé que l’hommage à Victor Hugo serait désormais permanent, en ouvrant les portes de sa maison natale au public en 2013.

Diantre ! Un hommage permanent ! Vous vous rendez compte un peu ? On ne parle plus d’années en 2 là. Victor ce sera tous les jours de l’année et à toute heure. On va bouffer du Hugo à tous les repas.
On n’habitera plus à Besançon mais à Besançon-ville-natale-de-Victor-Hugo

Les grandes manoeuvres ont donc démarré et l’objectif premier est évident : il faut mettre le paquet sur le côté Victor Hugo ET Besançon. Il faut légitimer le lien entre l’homme et la ville. Montrer au monde entier que non non Totor n’a pas pu naître dans notre si jolie ville par hasard et que oui oui il existe des liens profonds entre le grand homme et notre cité.

En un slogan ça pourrait donner :

« Il faut bisontiner le soldat Hugo »

Voilà d’ailleurs ce que l’on peut lire au tout début de ce spécial BVVH (Besançon Votre Victor Hugo) :

Je vous propose d’analyser ce court passage qui méritera à n’en point douter de rester dans les annales de ce qui s’annonce déjà comme l’« annus horribilis ». L’année horrible pour tous ceux qui ne digèrent pas le Victor Hugo servi en trop grande quantité.

Certes, Victor Hugo ne sera pas resté longtemps à Besançon, six semaines dit l’histoire (…)

Notez que le mot histoire ne commence pas par un H majuscule. Il n’est donc pas question ici de la grande Histoire, de celle à laquelle contribuent par leurs recherches les historiens sérieux. Non, il s’agit ici de l’histoire avec un petit h. Celle qu’on se raconte au comptoir entre quidams. Une bonne histoire, comme une bonne blague. On pourrait presque parler de rumeur, tiens !

[quote]Dis-donc t’es au courant pour le Victor ? On dit qu’y s’rait né chez nous par hasard pis qu’y se s’rait barré vite fait. Il tétait encore, le gamin. Et t’as vu un peu le flan qu’y z’en font à la mairie avec le Victor !? Rôôôô… [/quote]

À la thèse dérangeante « des six semaines » on nous oppose donc celle « des spécialistes » dont fait partie Arnaud Laster qui :

« pense que le tout petit Hugo est resté plus longtemps qu’on ne le dit généralement »

Attention hein, Monsieur Laster ce n’est pas la moitié d’un Hugolâtre. Il est universitaire et président de la Société des Amis de Victor Hugo. C’est écrit.
Il ajoute :

« Ça peut être plusieurs mois, car les dernières recherches laissent apparaitre que son père est parti de garnison en juin. »

Voilà donc d’un côté l’histoire avec un toute petit h et de l’autre des « pense que », des « peut être que » et des « laissent apparaître » avancés par des experts spécialisés et des spécialistes plein d’expertise.
Ce que l’on ne précise pas dans le BVV c’est que cette « histoire » des six semaines ne date pas d’hier et qu’elle aussi est le fruit de travaux d’historiens, des vrais qui semblaient d’accord depuis belle lurette.

Mais soit, le Totor est peut être finalement parti de Besançon beaucoup plus tard que ce que nous pensions jusque là ; soit à l’âge respectable de… quatre mois !!!

Dingue ! À quatre mois on n’est plus tout à fait un bébé c’est vrai. À cet âge-là, la fontanelle se referme, la tête tient toute seule depuis un bon moment et on peut raisonnablement envisager de… tenir une plume ! Il était précoce le Victor. Si si.

Pour l’âge du départ c’est fait. Parlons un peu maintenant des racines comtoises. Que dit le BVV ?

Woua ! Un autre expert. Biographe de Victor Hugo ET directeur au CNRS en plus. Ça c’est ronflant. Et voilà que ce spécialiste nous apprend que la grand-mère paternelle était native de Dole.
Dole qu’au passage notre expert écrit avec un accent circonflexe sur le O mais ça on a l’habitude. Je la fais aussi couramment celle-là.
Une mamie de Dôle donc.
Et notre chercheur d’ajouter que Victor Hugo – s’il n’est jamais revenu à Besançon – « conserve pour cette ville un attachement particulier d’un bout à l’autre de sa vie… » . Puis de rappeler que l’écrivain « choisit tout de même de dire dans un poème connu dans le monde entier qu’il est né à Besançon ; ce n’est pas anodin ».

Ce qui est d’autant moins anodin cher Jean-Marc c’est que Victor Hugo avait adjoint à Besançon – sa ville natale – le qualificatif de « vieille ville espagnole »…
Sí señor. Il l’a fait !

Voilà où nous en sommes du bisontinage en cours de notre cher Victor ; et l’on peut parier sans risque – qu’avant l’ouverture de sa Maison natale en 2013 – on nous présentera tout plein de découvertes de spécialistes sur les liens entre le poète, sa ville natale et le pays comtois :

  • Victor et le cheval en bois que son oncle lui avait offert pour ses 3 ans. Jouet en provenance directe des artisans du Jura, ce département de la Région Franche-Comté dont la capitale est… Besançon.
  • Victor et l’horloge comtoise qu’il avait acquise pour ses vieux jours auprès d’un horloger qui se fournissait exclusivement à… Besançon.
  • Victor et le vin d’Arbois…
  • Victor qui écrivit dans « La légende des siècles » ce vers : « Mon père, ce héros au sourire si doux… »
    Hé oui ! Le Doubs ! Qui comme chacun sait coule à… Besançon !

Pour terminer, aller ! Un peu d’anticipation. Notre maire nous donne un aperçu de ce que sera la Maison natale de Victor Hugo :

(…) Une scénographie ludique et moderne animera le premier étage, où se situait l’alcôve natale. Cet étage sera entièrement consacré aux combats d’Hugo. Le sous-sol abritera une salle multimédia.

L’alcôve natale. Une salle multimédia. Moi qui suis un peu féru de nouvelles technologies – et je sais que mon maire l’est aussi – je me prends à rêver.

Je pense à la réalité augmentée. Vous savez, on enfile de grosses lunettes bizarres, un casque et on a l’illusion d’y être en vrai. On se balade dans les lieux d’aujourd’hui en voyant des images d’hier reconstituées en 3D avec le son en prime.

Ici l’alcôve natale. Dedans le nourrisson, il braille. Sa mère aimante est penchée sur lui. Elle le change.

Et nous, derrière nos grosses lunettes, nous nous apitoyons devant cette scène intime. On se sent un peu voyeur, un peu voyageur du temps car nous, on sait : ce gamin deviendra célèbre, il écrira des choses incroyables, il deviendra Victor Hugo

Dommage : il ne reviendra jamais chez nous. L’ingrat !

La boucle est bouclée

« J’ai rêvé qu’on retournait vivre à Besançon…… et on y était bien. »

J’étais loin de me douter que cette petite phrase anodine, lancée avant même le premier café de la journée, il y a un peu plus d’un an, allait être annonciatrice d’un réel retour bisontin !
Ben ouais, comme beaucoup, je pensais avoir fait « le tour de la question ».

Retour vers le passé : après des années à vivre, à travailler dans la « grande capitale franc-comtoise »……, quel bonheur de quitter (fuir ?) cette ville trop exiguë, presque ennuyeuse. C’est sûr y’avait mieux ailleurs.

Alors voilà, on a pris nos cliques et nos claques, et nous voilà partis vers de nouveaux horizons. Un voyage d’est en ouest en passant par Paname, arrêt inévitable pour petits provinciaux en recherche d’expériences inédites.
On a aimé ces endroits, on a aimé les rencontres, on a aimé ces découvertes culinaires, on a aimé ces nouvelles « terres pleines de contrastes », mais… MAIS…… partout, ce même sentiment de « manque ». Étrange. Un manque qui, à chaque petit retour en terre comtoise, enfle. Pourquoi ? Et si on ouvrait les yeux et si – enfin – on acceptait de regarder les choses en face.

Mais oui, on est bien à Besançon. On respire, on marche, on parle, on échange, on partage.… Ça va certainement vous faire rire sauf que, ce n’est pas rien. On ne se sent plus étranger parmi des étrangers. À avancer tels des zombis ou à végéter dans sa « bulle » socio-professionnelle.

Quel plaisir de redécouvrir cette petite ville préservée d’un développement trop brutal. Cette ville au patrimoine si riche qu’il en est quelquefois étouffant. Mais surtout cette ville où les habitants se mélangent encore…… Alors n’en déplaise à certains, on vit bien et serein à Besançon ! Cessons d’envier les autres, ne cédons pas aux sirènes du « toujours plus grand », sans pour autant fermer la porte à la nouveauté.

En bref, restons nous même car si la ville est un bien bel écrin, son vrai trésor réside dans ses habitants.

Estelle et Michel23

Photo : the Glint
Besançon par theGlint c’est ici.

Retrouvez Michel23 sur son blog « Il est pas bon mon jambon ?« 

Victorizo

J’ai fait un rêve… un drôle de rêve, une drôle d’idée.

Je vous explique : comme tous les 10 ans, Besançon s’apprête à célébrer dignement l’anniversaire de l’enfant le plus célèbre de la ville : Victor Hugo… 1802/2012
Sans doute avez-vous aperçu des affiches dans la ville ; la colle est encore toute fraîche. Sinon voici une mise en bouche :

http://franche-comte.france3.fr/info/besancon–le-grand-retour-de-victor-hugo–72215616.html

On le sait, c’est un fait : ce cher Totor a passé sa vie entière en étant convaincu d’être né en Espagne…

Extrait :

(…)
Alors dans Besançon, vieille ville espagnole,
Jeté comme la graine au gré de l’air qui vole,
Naquit d’un sang breton et lorrain à la fois
Un enfant sans couleur, sans regard et sans voix
(…)

C’est un peu ridicule mais il en est ainsi : les grands écrivains ont parfois des lacunes géographiques. Certains géographes – de leur côté – ont d’ailleurs du mal avec l’accord du participe passé lorsqu’il est employé avec l’auxiliaire avoir placé avant ou après le complément d’objet direct. Chacun son truc donc. On ne peut pas être bon partout.

Totor étant né en Espagne donc (en nuestra ciudad), ne pourrions-nous pas rendre hommage à son (très court) passage chez nous en s’évadant du pompeux et du révérencieux trop souvent de mise à son égard et en intégrant une ch’tite pointe d’humour aux festivités ?

C’est là que mon rêve intervient et l’idée dont j’ai rêvée est simple :

et si on organisait une paella géante sur la place de la Révolution !? Hein ?

Je ferme les yeux et je vois déjà Esmeralda passant de table en table pour y servir la sangria, au passage elle fait les lignes de la main de quelques Bisontins, leur prédisant si oui ou non le tram leur coûtera les yeux de la tête… Rhaaa Esmeralda !

La paella géante pourrait éventuellement être suivie d’un lâcher de taureaux dans la Grande rue. Ou pas.

¿Está de acuerdo?

Besançon d’hier à demain… les pages qu’on tourne

J’aime que ma ville évolue. Mais j’aime surtout qu’elle l’assume et associe intelligemment ses habitants à ses mutations.
J’aime que Besançon ait des projets d’avenir ; que nos quartiers ne restent pas immuables. Mais j’aime aussi que l’on donne aux habitants la possibilité de « tourner la page » d’un passé dont on ne se déleste pas comme on le fait d’une paire de chaussures usagées.

Je ne suis ni pro ni anti-tram. Mais il est vrai que le sujet m’intéresse. En tant que blogueur, ce projet est une « mine d’or »… notamment de par la communication catastrophique qui le caractérise depuis le début.

Concernant les platanes du quai Veil Picard. J’ai parfaitement assimilé, depuis le vote du projet, qu’ils allaient disparaitre. Ce que j’ai cependant du mal à accepter c’est que l’on n’ait rien proposé aux Bisontins pour leur permettre de « faire leur deuil » de l’ancien quai. Que cela ait été fait « en douce » sans même communiquer la date de l’abattage et en en gardant le secret jusqu’à la dernière minute.
Vous savez, c’est la bonne vieille méthode de l’infirmière qui doit faire une piqure à un gosse douillet : elle parle d’autre chose, elle attend que l’enfant regarde ailleurs et paf ! Elle pique.
Mais bon sang ! Nous ne sommes pas des enfants.

Ces platanes étaient là depuis plus de cent ans. Ils appartenaient au quai. La Ville aurait pu organiser en amont une fête, un concours photo ou relever des témoignages d’habitants… Cette dame par exemple aurait eu tant de choses à dire sur son quai. Cela l’aurait aidée elle aussi à passer à autre chose.
Bien sûr qu’il y aurait eu de la nostalgie mais cela aurait donné l’occasion à chacun de dire « au revoir » dignement ; et pas seulement à des arbres mais aussi à un paysage familier, à un lieu chargé d’Histoire (la grande) et d’histoires (les petites).
Bref, on aurait pu vivre un moment symbolique et fort tous ensemble puis on aurait su regarder vers l’avenir. Sans regret et sans jeter nos souvenirs dans le Doubs pour autant.
L’Association Tambour Battant est d’ailleurs à l’origine d’une idée similaire qui devrait prochainement aboutir. Une fête pour « saluer » l’actuel pont Battant qui sera détruit au printemps…

Aujourd’hui ce que l’on a vu était bien différent : des agents de la ville tournant en toute discrétion dès 6h du matin pour installer des panneaux et des barrières avec comme consigne de ne surtout rien dire. Des policiers collant des PV sur des véhicules afin de les faire déguerpir au plus vite du quai. Bien sûr qu’on aurait pu installer dès la veille des panneaux pour prévenir mais… cela aurait appris aux curieux que c’était la veille du grand jour. Et le silence, le secret étaient de mise dans cette affaire. Pourquoi au fait cette paranoïa ?
Ensuite ce furent les bûcherons qui se mirent au travail, encore encadrés par quelques policiers au cas où les Bisontins, ces grands enfants, auraient eu l’idée de leur faire avaler leurs tronçonneuses.
Bilan de la journée : un coup de gomme sur l’ancien quai. Efficace, rationnel, organisé… pour le facteur humain, rien. Vous ne vouliez pas une cellule psychologique non plus hein ?
En définitive, encore un chouette coup de com’ bien réussi pour l’opération tramway qui n’en avait décidément pas besoin.

Malgré ça, je ne suis même pas un anti-tram. Juste un habitant peiné par cette manière de faire les choses. D’être pris pour un enfant par ces « grands » qui nous administrent et ne nous font pas confiance.
J’aime que Besançon change. Qu’elle sorte de sa carte postale. Qu’elle ne soit pas qu’une ville musée engoncée dans ses remparts, servie et resservie à la sauce Vauban-Victor-Hugo – jusqu’à la nausée.
J’ai juste envie qu’on réalise que les habitants de cette ville ont du coeur, des souvenirs, des attaches et que ça n’en fait pas des « conservateurs » pour autant. Qu’on leur donne envie de ce « demain ». Qu’ils n’aient pas sans cesse l’impression qu’on leur impose.

Juste quelques mètres

Si je vous écris aujourd’hui, c’est pour vous parler d’une dame très âgée qui a toujours connu les arbres sur son quai, mais oui les fameux platanes qui l’ont accompagnée toute sa vie durant, bruissant de moineaux au printemps et qui depuis sa fenêtre constituent sa vue depuis plus de 80 ans.
Elle ne pèse pas grand chose dans ce projet, mais pour moi elle représente tout.

Ses platanes sous sa fenêtre l’ont accompagnée, ils ont salué les départs définitifs, les arrivées joyeuses des baptêmes et des mariages, les corbeilles pleines de beignets. Il fut un temps où sur les quais à la faveur des vrais étés, chacun tirait sa chaise sous les arbres, les dames sur leur ouvrage et les hommes lisant leur journal.
On discutait entre voisins, le quai ne connaissait pas alors cette satanée plaie automobile.

Cette dame a connu le tram, un tram d’une seule voie et le chien de la maison qui, invariablement se couchait sur les rails, houspillé par le watman qui n’hésitait pas à descendre de sa machine. Toute une époque révolue où les vrais orages zébraient l’été et agitaient les arbres…
Ces arbres constituent depuis le début de son temps, un rempart et un refuge, le défilement des saisons la mettant à l’abri des rumeurs de la ville. Tant d’oiseaux étourdis échappés des feuillages y ont trouvé refuge.

La perte de son environnement va accélérer le terme de sa vie, et je serai à ses côtés au moment de l’abattage des arbres, de peur qu’elle ne soit prise de faiblesse. Mais c’est une dame courageuse, qui a vécu son lot de drames et elle veut bien faire un bout de chemin encore et pourquoi pas elle me l’a dit, que sa vie lui permettre de faire un tour de ce fichu tram.

Mais je vois son regard quand elle suit les engins qui passent sous ses fenêtres « ils vont couper nos arbres, casser notre quai » et je sens qu’elle tremble en dedans, si fragile que promesses insensées me viennent, que oui malgré mon impuissance, je veux la protéger.

Ils disent que la voie entre la rue Marulaz et le pont Battant est trop étroite pour effectuer une replantation d’arbres, elle est cependant assez large pour faire passer deux trams, alors de grâce, quelques mètres encore s’il vous plait, juste quelques mètres, qu’après cette désolation et ce massacre de notre patrimoine, elle voit un tronc s’élever, des racines s’installer et un bouquet de feuilles nouvelles s’agiter dans le vent.


À propos de ce texte…

Ce texte que vous venez de lire n’est pas de moi. Il s’agit d’un commentaire laissé par une personne anonyme ce vendredi soir. Il m’a beaucoup touché. Je le trouve magnifiquement écrit et je remercie son auteur de me l’avoir confié.
Je l’ai pris comme un cadeau. De ce genre de cadeau que l’on se doit de partager. J’ai donc pensé que ces mots méritaient d’être lus de chacun… Je les ai juste illustrés de cette carte postale ancienne du quai Veil Picard.
J’adresse une pensée très affectueuse à cette dame qui a connu tant de saisons sur ce quai… Sur son quai.

Photographes, peintres, sculpteurs… et si vous exposiez gratuitement chez Etam ?

Tout commence avec la marque de lingerie Etam qui veut s’offrir un coup de pub rajeunissant.
En 2012 on fait comment déjà ? Ah oui ! Un buzz sur le Net via une vidéo virale… évidemment.

La vidéo a donc été publiée sur DailyMotion ce lundi 9 janvier . On y voit trois mannequins en mode un peu cruche filmées en caméra cachée alors qu’elles s’apprêtent à pénétrer dans le Musée d’Orsay :

[quote]Nous allons visiter le Musée d’Orsay et… Nous allons improviser un défilé de mode à l’intérieur.[/quote]

Une fois dans les lieux, elles simulent brièvement de l’intérêt pour les oeuvres puis soudainement, ôtent leurs impers et Ô ! suprise… les voici aux trois-quarts nues, tout juste vêtues de leur lingerie… Etam !

Alors s’ensuit une course échevelée au travers de quelques salles d’Orsay – façon dindes inconscientes tentant d’échapper avec le sourire au Réveillon de Noël.
Sur leur passage, elles semblent faire forte impression (ah ah) auprès des visiteurs. Seules les toiles impressionnistes restent stoïques. Les filles sortent ensuite en courant, visiblement très excitées par leur performance.

Slogan : Vous les avez manquées… retrouvez-les lors du live show Etam bla bla bla…

[iframe http://www.dailymotion.com/embed/video/xnjtk2 560 315]

Au final le buzz n’a pas réellement pris mais le Musée d’Orsay, lui, l’a très mal pris comme en atteste cette réaction d’une porte-parole du temple de l’impressionnisme :

[quote]Cette vidéo, tournée en fraude, porte une grave atteinte aux droits du musée d’Orsay mais également aux droits de tiers, dont le musée ne saurait être tenu pour responsable. »[/quote]

Pas content non plus le président du Musée d’Orsay qui va demander au PDG d’Etam que la vidéo soit retirée du Web. Et rappelant que filmer et photographier sont interdits dans l’enceinte du musée et qu’aucune demande d’autorisation de tournage en bonne et due forme n’avait été présentée. Menaces de poursuites judiciaires, gros yeux, sourcils qui se froncent…

Lexpress.fr raconte : Des filles en culotte chez les impressionnistes : le musée d’Orsay proteste

En résumé, nous avons :

  • d’un côté la marque de lingerie Etam qui s’offre une image un peu fofolle, moderne (utilisation des outils de com’ qui plaisent aux djeunes) et limite rebelle (pensez donc, on a bravé la loi nous madame et en petite culotte en plus !).
  • de l’autre côté, ce bon vieux Musée d’Orsay suffisamment ringard pour avoir interdit de photographier chez lui depuis juin 2010 (ce qui avait provoqué un tollé chez de nombreux photographes). Le musée donc, qui sort la grosse artillerie : poursuites judiciaires, atteinte à l’image et à la réputation… C’est son droit mais…

Mais en définitive quelles peuvent bien être les retombées de ce petit buzz en terme d’image ? Pour Etam, l’humour, la légèreté, la jeunesse, le modernisme, la vie quoi ; et pour Orsay, l’image d’une institution coincée, procédurière et sans humour qui veut figer son image dans le marbre… le passé quoi…

Qui gagne ? Etam évidemment qui s’offre à bas prix (dommages et intérêts compris) une com’ rajeunissante à destination d’une clientèle qu’elle cherche sans doute à séduire.

Et pourtant…

Et pourtant rien de « moderne » dans cette vidéo qui donne une image affligeante de ces filles… Des « porte-fringues » (si peu) lâchées en liberté dans ce temple de « la culture ». Culture uniquement bonne à servir de décor à leur jeu juvénile, mais surtout pas de nourriture spirituelle.

Logique n’est-ce pas ? Des jolies filles dans un musée… des mannequins qui plus est… Elles ne peuvent pas être là pour s’intéresser aux tableaux… n’est-ce pas ?

Et pourquoi pas une réponse du berger à la bergère ?

Et si Orsay au lieu de faire sa vierge de marbre effarouchée en profitait également pour offrir une cure de jeunesse à son image via un joli « contre-buzz » ?

Et si la bonne vieille institution muséale répondait du tac au tac à Etam et avait suffisamment d’humour pour se faire le porte-parole du monde de l’art en lançant un appel aux artistes plasticiens, peintres, sculpteur, photographes,etc… et en leur disant en substance :

Vous êtes sans doute en recherche de lieu d’exposition pour vos oeuvres ?

Il y a bien une boutique Etam dans votre ville ?

Allez donc y accrocher vos oeuvres.  Mais ne demandez pas d’autorisation, c’est inutile. Entrez tout simplement et exposez.

Bien sûr, n’oubliez pas de filmer la scène et de diffuser vos vidéos sur Internet… ça peut devenir de l’art en soi.
Des performances filmées qui pourraient même intéresser certains musées.

Le Centre Pompidou par exemple. Allez savoir…

Chiche ?