En vérité, je suis tombé totalement par hasard sur cette scène, mercredi dernier, derrière le Théâtre musical de Besançon. Un employé jetait par centaines des brochures de la saison tout juste terminée.
L’homme prenait bien soin d’ôter le film plastique emballant les brochures par dix afin de transvaser ces dernières directement dans la « poubelle vert », celle des recyclables.
La voiture était remplie de brochures neuves déjà obsolètes, imprimées pour rien.
Le théâtre n’est sans doute pas le seul a procéder de la sorte. Je ne blâme pas l’employé qui accomplissait le travail qu’on lui avait confié. Mais à propos de ce gâchis de ressources naturelles, d’énergie, d’argent public… on peut parler de gaspillage absurde non ?
Il faudra bien un jour qu’on s’interroge sur ces publications papier imprimées en surnombre et au final, détruites en catimini.
D’abord il y a cette pièce de l’Italien Romeo Castellucci : « Sul concetto di volto nel Figlio di Dio » (Sur le concept du visage du fils de Dieu) qui met en scène un père malade, incontinent et son fils dévoué. Le tout devant le visage gigantesque du Christ peint par Antonello da Messina. Un visage qui occupe tout le fond de la scène.
La pièce n’a pas du tout plu à certains fondamentalistes chrétiens. Criant au blasphème, ils ont tout fait pour perturber ses représentations au Théâtre de la Ville à Paris, envoyant en première ligne des porteurs de bombers aux cheveux aussi ras que leurs idées sont courtes.
Durant l’été, la pièce avait été jouée au Festival d’Avignon dans une version dont la fin différait : on y voyait des enfants jettant des grenades à la face du Christ – scène qui avait choqué certains croyants. La pièce présentée ensuite à Paris avait été expurgée de cette fin. Mais cela n’a pas empêché les réactions extrêmes des fondamentalistes.
Sur le site du Festival d’Avignon, on trouve une page dédiée à cette pièce. Il y a quelques jours encore, on pouvait y consulter une vidéo présentant des extraits de l’oeuvre filmée lors du festival.
Parmi ces extraits se trouvait la scène du lancer de grenades. J’avais trouvé cette vidéo par hasard suite à la lecture d’un article dans la presse sur cette affaire.
Aujourd’hui, je constate que la vidéo a été supprimée ainsi que toutes les mentions y faisant référence. Discrètement et sans explication.
Ne subsiste comme images qu’un diaporama dans lequel se trouve d’ailleurs une photographie de la « scène des grenades« .
Alors pourquoi le Festival d’Avignon a-t-il fait disparaitre en douce cette vidéo de son site ? Les organisateurs ont-ils subi des pressions ? Ont-ils cédé face aux chrétiens fondamentalistes ?
S’il s’agit d’un cas d’autocensure, il est pour le moins inquiétant.