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Et si le tramway bisontin apprivoisait un peu le grand méchant Web ?

Dans l’Est Républicain du dimanche 19 février 2012, il y a un article d’Eric Barbier avec un titre très « rentre dedans » :

Jean-Louis Fousseret est excédé par les chiffres virtuels qui circulent sur le tram

« J’ATTAQUERAI EN DIFFAMATION… »

Le maire de Besançon, également président de la Communauté d’agglomération a décidé de ne plus laisser dire n’importe quoi sur le tramway. Visiblement, Jean-Louis Fousseret a été excédé par des commentaires anonymes laissés sur Internet et affirmant que le coût du projet de tram exploserait.

Il faut dire que ça cause comme au comptoir dans les commentaires de certains billets.

Donc ras-le-bol ! C’est dit : à l’avenir, la justice pourrait bien être mise dans le coup et s’il faut en arriver là, des plaintes en diffamation seront déposées.

Une suggestion en passant : la maison d’arrêt étant déjà bien pleine, peut-être pourrions-nous réclamer l’incarcération des coupables dans l’aquarium de la Sainte Maquette durant quelques jours. Le pire des châtiments pour ces vilains garnements !

Deux extraits de l’article paru dans l’Est Républicain ce 19/02/2012

Déjà dans le dernier BVV, on pouvait lire une charge du maire de Besançon contre « les calomnies » . Dans un éditorial baptisé « 2012, l’année de la vérité » , il visait clairement les accusations de l’opposition relatives au marché de construction des rames du tram confié à une entreprise espagnole et non au local de l’étape, Alstom.

Le coupable

Ce salopard, ce couard, ce félon pointé du doigt par M.Fousseret. Celui qu’il désigne vertement comme le grand saboteur de l’image du tramway auprès de la population bisontine. Le présumé coupable c’est lui :

« le grand méchant Web »

Ouf ! L’honneur est sauf… Ce n’était donc pas la faute de la communication calamiteuse autour de ce projet. Communication toujours prompte à nous noyer de chiffres démontrant l’impérieuse nécessité du tramway mais incapable de créer simplement « l’envie » pourtant nécessaire à l’adhésion de la population. Non non, la communication institutionnelle est blanchie, innocente. Le problème vient d’Internet.

D’ailleurs vous savez quoi ? L’article de l’Est Républicain est illustré d’une image capturée sur une page Internet. Oh ! Pas n’importe quelle page : la page Facebook « Tramway Grand Besançon » que vous trouverez ici si vous n’y êtes pas encore abonné.

En voilà de l’Internet fiable et institutionnel. C’est officiel ça Madame.
C’est LA page Facebook du tramway du Grand Besançon. Rassurante. On y retrouve le logo que les Bisontins commencent à bien connaître. Les infos qui y sont publiées sont pour l’essentiel reprises du portail officiel du tramway, comme les images d’ailleurs et même les infos générales qui sont copiées-collées depuis le site officiel.

C’est sûr qu’en venant là, on ne risque pas de tomber sur du Web de caniveau avec des méchants commentaires calomnieux voire diffamatoires envers le tram.

En pourtant…

Et pourtant cette page Facebook est tout sauf officielle. Elle n’a pas été créée par le Grand Besançon. Elle est l’initiative d’une agence locale « spécialisée dans le contenu qui conseille les marques, les entreprises et les institutions dans leur communication digitale ». Une agence que le Grand Besançon n’a pas mandatée et qui laisse habilement planer le doute sur l’officialité de ladite page… pour en faire quoi au fait ? C’est peut-être au service supposé gérer la communication autour du projet de tramway de se renseigner non ? Ils sont au courant depuis quelques temps déjà…

Un autre exemple édifiant : le 17 novembre dernier, un compte Twitter « @TramwayBesancon » a été créé. La communauté locale Twitter s’y est vite intéressée et s’est demandée si ce compte était « officiel ». J’ai personnellement adressé quelques messages à des personnes impliquées dans le projet pour en savoir plus. Aucune n’a daigné répondre.

Les premiers messages publiés par le compte en question semblant fiables, il a très vite gagné des abonnés : plus d’une centaine de personnes parmi lesquelles la plupart des journalistes locaux.
Un compte potentiellement officiel donc, jusqu’à ce message publié le 17 janvier :

 

Evidemment, après ça…

Grand méchant Web ?

Des gens qui se défoulent, disent n’importe quoi, colportent des rumeurs et diffament, il y en a toujours eu. Avec Internet, l’anonymat et les commentaires de blogs ou de sites d’information en ligne, c’est encore plus facile. Mais tous les commentaires ne sont pas à classer dans cette catégorie. Loin s’en faut. Beaucoup expriment aussi des ressentis et des positions bien légitimes. Certains s’opposent ou critiquent, d’autres s’interrogent, doutent ou expriment un certain désarroi face aux travaux et à la ville qui change. Face à un projet qu’ils ne comprennent pas toujours.

Alors au lieu d’accuser le grand méchant Web, peut-être serait-il temps de tenter de l’apprivoiser un peu, car beaucoup d’opinions sur le tramway s’y construisent sur la base d’un grand n’importe quoi qu’on lit ici ou là…
Il pourrait être intéressant notamment de créer une (vraie) page Facebook officielle pour communiquer directement avec les Grands-Bisontins (ils sont nombreux sur ce réseau social). Evidemment, que cette page recevra souvent des commentaires critiques ; mais au moins il y aura la possibilité d’y répondre, d’argumenter et donc de ne pas laisser le champ libre aux détracteurs de tout poil.

Être présent sur les réseaux sociaux pour un projet tel que celui-ci — serait aussi et surtout une manière de montrer qu’il y a des gens qui écoutent et réagissent derrière le monolithique tram. Et ça c’est incontournable pour commencer à susciter l’envie.

Dis-donc ducon, y’a plus grave non ?

— Dis ducon, t’en as pas un peu marre de nous gonfler avec tes arbres abattus ? Tu ferais mieux de gueuler contre l’élevage de visons qui se trouve pas loin d’ici ! C’est quand même plus grave que trois arbres pourris tu crois pas !?

— Dis blaireau, ça va ? Tu te sens pas un peu ridicule avec tes visons, alors que partout dans le pays y’a des gens au chômage ? Ils s’en cognent de tes rats à fourrure tu sais !

— Dis pétasse, t’as pas honte de nous faire chialer avec tes copains chômeurs alors qu’il y a des gens malades qui souffrent vraiment — eux !

— Dis enfoiré, y’a plus grave qu’être au chaud dans un hôpital tu penses pas ? Regarde tous ces gens qui dorment dans la rue !

— Dis trouduc, t’as pas l’impression d’en faire des tonnes avec tes SDF ? Y’a pire : t’as vu les Syriens qui n’ont même pas le droit d’y descendre — dans la rue — pour réclamer leur liberté !

— Dis nunuche, tu crois pas qu’on en fait des tonnes avec les Syriens ? D’autres peuples se battent contre des tyrannies encore plus cruelles et personne n’en parle !

— Dis dugland, t’as pas entendu parler des gosses qui meurent de faim ? Ils s’en balancent eux de la politique. Ils ont juste faim !

— Dis-donc connard, tes petits Somaliens là. Si t’en parles c’est qu’ils sont encore en vie non ? Y’a pas plus grave tu crois ? T’as même pas eu un mot pour Whitney Houston ! Sale con d’bobo va !

Feu le sujet végétal majestueux du 6 rue de la Madeleine

— Monsieur Teint !

— Ah ! Bonjour Madame Durand !

— Bonjour Monsieur Teint. Excusez-moi de vous importuner mais vous pourrez peut-être m’aider. Voilà, j’ai reçu une lettre de la mairie et je ne comprends pas tout. Mes vieux yeux y sont sans doute pour quelque chose mais c’est surtout qu’il y a des phrases bizarres…

— Si je peux vous être utile Mme Durand… Faites-moi voir cette lettre…

— Vous étiez tout de même au courant des travaux qui vont commencer au 6 rue de la Madeleine ?

— Oui oui. Ça j’ai bien compris et je sais que ça ne va pas tarder. Le chantier et tout ça. C’est la suite qui m’échappe. J’ai surligné certains passages. Là voyez, ils écrivent :

Le projet initial prévoyait le maintien du sujet végétal majestueux dans la grande cour.
Néanmoins, un diagnostic mené par l’ONF a démontré la présence de champignons créant un risque de rupture.
Compte tenu de ce diagnostic, il sera donc finalement abattu et remplacé par un nouveau sujet d’envergure qui pourra s’épanouir et recréer une ambiance végétale unique dans cet espace privilégié du quartier Battant.

— En effet, c’est alambiqué… Mais je pense qu’on peut le dire plus simplement, sans tourner autour du pot. Tenez :

Le projet que l’on vous a présenté promettait de conserver le grand et magnifique arbre qui est dans la grande cour.
Néanmoins, un diagnostic mené par l’ONF a démontré la présence de champignons qui vont grandement faciliter les affaires du promoteur de ce projet immobilier. Promoteur pour qui cette saloperie d’arbre était sans doute une vraie plaie en plein milieu de son chantier avec tous les engins qui vont devoir y circuler pour construire au plus vite ces immeubles qui vont lui rapporter plein de pognon.
Compte tenu de ce diagnostic et de ces intérêts qu’il convient de satisfaire, l’arbre sera donc finalement abattu et remplacé par un arbuste qui grandira lui aussi, si si. Et dans 50 ans vous verrez ça aura de la gueule.

— Alors ils vont le couper notre grand arbre… Comme son voisin le conifère qu’on savait déjà condamné. Et ils nous préviennent la veille évidemment…

— Oui Madame Durand… Il ne faut pas laisser aux riverains le temps de pétitionner, vous pensez bien.

— Vous le connaissez M.Teint ce dicton :  « Qui veut noyer son chien l’accuse d’avoir la rage » ?

— Oui Mme Durand. La rage ou bien… des champignons n’est-ce pas ?

Madame Durand m’a rappelé en fin d’après-midi. Le conifère a été débité aujourd’hui.
Son voisin, le « sujet végétal majestueux » dont on avait promis le « maintien » aux riverains de la cour. Son voisin attend maintenant son tour.

Au passage si vous aviez flashé sur cette image bucolique et arborée quand vous avez réservé l’un des futurs appartements du Clos Chapelaine (ah, ces petits noms ruraux pour sonner rustique), il va falloir vous faire une raison : vous avez acheté un grand et magnifique arbre mort.

Et le lendemain :

BesaQ la chaude

Oui oui le froid est là. On sait ça. Le gel, la glace, le verglas, les canalisations qui pètent et les fontaines transformées en banquises miniatures.
Et pourtant, Besançon n’a jamais été aussi chaude. Limite chaudasse.

Tout a commencé avec le plus respectable et le plus âgé d’entre nous. J’ai nommé Victor Hugo – 210 ans au compteur et toujours vaillant. Le plus célèbre des Bisontins s’affiche depuis le début du mois de février en grand format dans la ville. Et diantre ! L’une des ces affiches est comment dire… whoua !!!

Pour illustrer Hugo « l’homme engagé », on a donc choisi une citation extraite… d’une chanson de France Gall (de Michel Berger pour être plus précis).
J’aime bien ce décalage. Ça nous décrispe un peu dans notre rapport à Victor Hugo, et ça c’est nouveau.
Mais là où cette affiche devient franchement surprenante, c’est qu’un martinet à lanières de cuir illustre le tout !

sado-maso ?

Alors quoi ? La Ville de Besançon nous vend un Victor Hugo coquin voire sado-maso ? Nan ??? Comme vous y allez ! Il s’agit plus probablement d’une allusion au combat de l’écrivain en faveur des droits des enfants. Si hein ?
Oui. Mais voilà : aujourd’hui le martinet est plutôt connoté « jouet de grands » et au passage tant mieux s’il l’on n’en vend plus pour corriger de pauvres gosses.

Bref, je dois avoir l’esprit tordu mais…  Et si… et si tout ça n’était en définitive qu’un « teasing » un brin culturel pour faire monter la fièvre avant… le Salon de l’Érotisme – salon qui se déroulait ce week-end à Besançon ?
Mmmmm…. d’ailleurs que voit-on sur le site de l’Office du Tourisme de Besançon ?
On voit notre Victor et le Salon de l’Érotisme se mêlant complicemment complaisamment dans des intérêts publicitaires croisés :

Ah ! L’affiche du Salon de l’Érotisme ! C’est un euphémisme de dire qu’elle ne fait pas dans la finesse. Voyez un peu la bibite qui vous fait coucou, si c’est pas mignon :

Au passage, faudrait penser à changer le nom de ce salon, juste pour être raccord avec le contenu : Salon du Q ou du porno ce serait plus honnête non ? Bah oui l’érotisme ce n’est pas la quéquette. C’est la suggestion de la quéquette ! J’aurais pu bosser pour Révillon moi.

Arf ! Définitivement, je préfère mon Totor avec son martinet à lanières. Au moins lui nous vend du rêve, ou pas. Question de goût.

Un complot ?

Alors quoi ? Un complot de la sphère politico-médiatique en faveur des intérêts capitalo-dévergondés du Salon de l’Érotisme ? C’est bien possible oui ! Pour preuve cette affichette que l’Est Républicain a essaimée un peu partout dans la ville ce vendredi – veille du salon. Comme par hasard.

Le message est à peine subliminal… à peine :

Heureusement : il nous reste la tendresse… après cette débauche de sexe.

Un poutou ça vous tente ?

Quand la Région Franche-Comté invente le sondage d’autosatisfaction

Sur le site du Conseil régional de Franche-Comté, il y a un sondage mythique. Un parfait exemple de questionnaire orienté.

C’est mignon non ces questions de bisounours ? On appelle ça un « questionnaire fermé ». On prétend vous demander votre avis mais en définitive, les réponses sont préétablies et également très « guidées ».

Les cinq envies/attentes qui sont proposées à votre choix sont toutes très consensuelles, formulées précisément afin que rien ne dépasse dans le rang des sondés. Quoi que vous répondiez, cela reviendra à dire : « Avec le TGV ça va être trop d’la balle ! ». Pas même la possibilité de voter « blanc ».

La question posée est elle-même un petit chef d’œuvre puisqu’on ne vous demande pas :

« D’après vous, que doit prioritairement apporter le TGV Rhin-Rhône à la Franche-Comté ? »

Non. On vous questionne sur ce qui va se passer :

« D’après vous, que va-t-il apporter prioritairement à la Franche-Comté ? »

En fait ce sondage vous propose de faire un pari sur l’avenir. C’est un peu le PMU, un peu Elisabeth Tessier, un peu l’oracle de Delphes.

En définitive, on ne voit vraiment pas en quoi ces réponses pourront apporter un quelconque indicateur aux services du Conseil régional afin de cerner vos attentes et vos envies. Chacune correspond déjà à l’un des objectifs de l’action régionale et évidemment que – dans l’idéal – l’arrivée de la nouvelle ligne LGV est supposée contribuer à tous ces objectifs. C’est en tout cas ce que l’on nous a promis. Alors pourquoi faire un choix ? A quoi bon être sondé ?

Alors pour quoi faire ?

Pour commencer, ce sondage est là pour nous rappeler les bienfaits attendus du TGV Rhin-Rhône. Ils sont là – les cinq – présentés sous nos yeux ébahis et l’on se dit qu’on est des petits chanceux.

Ensuite si l’on avait réellement voulu connaître vos envies et vos attentes, sans doute auriez vous eu la possibilité de faire vos propres propositions. Nous n’aurions plus affaire à un sondage fermé mais à une enquête sérieuse mais là… Mais là ce serait risqué pour l’image du TGV Rhin-Rhône car tout ne va pas bien contrairement à ce que laissent entendre les rumeurs bisounours.
Laisser remonter les récriminations c’est prendre le risque de retrouver sur le Web régional des attentes du type :

  • Pas d’augmentation de tarif excessive notamment sur les liaisons qui existaient déjà et sur lesquelles au final le gain de temps est négligeable (Besançon-Paris notamment) ;
  • une navette Viotte-Auxon au fonctionnement et à la tarification lisible ;
  • des parkings qui ne pratiquent pas des tarifs évoquant plus le racket organisé qu’une mission de service public ;
  • des TGV qui ne soient pas les vieilles rames recyclées des lignes plus anciennes ;
  • … (à vous d’en proposer d’autres dans les commentaires)

Alors à quoi servira ce sondage ?

Regardons d’abord les votes déjà enregistrés :

Maintenant imaginons comment les résultats de ce sondage pourraient être évoqués dans le prochain Franche-Comté Mag – magazine du Conseil régional.

C’est imaginaire bien sûr…


Pour aller plus loin

Il faut bisontiner le soldat Hugo !

Ce texte est l’adaptation d’une chronique que j’ai faite pour « La seule émission qui n’a pas de nom » sur Radio Bip. Vous pouvez l’écouter grâce à ce lecteur. L’émission intégrale avec Ranok et Michel23 est à écouter sans modération ici : http://pseudoblog.free.fr/?p=903

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C’est bien connu, Victor Hugo est né à Besançon le 26 février 1802. Il aura donc 210 ans le 26 février prochain. Alors tous en chœur :

Joyeux anniversaire Victor ! Joyeux anniversaire Victor ! Joyeux aaaaaaanniversaire Victor ! Joyeux AN-NI-VER-SAIRE !

Sauf que Victor est mort… Il y a déjà bien longtemps vous savez. Mais peu importe car les illustres ne meurent jamais vraiment. Chaque « année en 2 » nous en apporte la preuve à Besançon.
Ces années-là nous offrent l’occasion de décongeler Victor et de sortir de son musée de cire cet écrivain fameux qui nous a fait l’immense honneur de naître chez nous, dans notre cité. Quoi de plus normal ?

Il faut cependant  reconnaître que la naissance bisontine du grand homme nous pose un épineux problème, puisque précisément – nous n’avons jamais vu Victor Hugo « le grand homme » dans nos murs. Nous n’y avons aperçu que Totor – le nourrisson. Et ce fut on ne peut plus furtif.
À peine né – au hasard d’un passage en garnison de Hugo père – soldat de profession – à peine né et déjà reparti vers le destin qu’on lui connait. Et Victor une fois parti, n’est plus jamais revenu. Jamais.

En résumé et pour faire simple : l’un des plus fameux écrivains de tous les temps est né à Besançon mais il n’a fait qu’y brailler et y téter sa mère.
Hugo le barbu, Hugo l’auréolé de gloire littéraire et politique, cet Hugo-là nous a snobés. Vexant.

Pourtant les Bisontins n’ont pas été rancuniers. Ils ont célébré leur glorieux natif comme il se doit : ils lui ont érigé des statues, ont offert son nom à sa place natale et vous rencontrerez l’enseigne « Victor Hugo » un peu partout dans la ville et sur tout et n’importe quoi : restaurant, cinéma, agence immobilière, montre de luxe, gâteau, collège, lycée et bientôt bientôt sur une rame du tramway tant attendu, tant espéré, tant réclamé par les Bisontins.

« Mais ça ne suffit pas ! Il faut faire plus ! » clame en substance Jean-Louis Fousseret dans le BVV de février qui comporte un encart spécial Victor Hugo.
J’en profite au passage pour rappeler que les trois lettres BVV signifient « Besançon Votre Ville » et pas du tout « Besançon Ville de Vieux » comme je l’ai lu cette semaine. Certaines personnes sont d’une méchanceté…vraiment.

Voici dont les mots exacts de notre maire. Il répond à une question posée par un journaliste du BVV (tiens, en voilà un bel oxymore).

Qu’ont en commun l’action de la Ville et les idées de Victor Hugo ?

Victor Hugo est l’écrivain français le plus connu au monde, sa renommée est immense. J’estime que les idées et la philosophie d’Hugo sont toujours d’actualité. Nous nous devons de l’associer à l’image de la ville, car sa notoriété contribue à notre attractivité touristique. (…)

L’essentiel est dit. Il faut associer Victor Hugo à l’image de la ville, pour ses idées politiques et philosophiques évidemment (ça c’est fait) mais aussi et surtout pour les retombées touristiques tant espérées.
Vauban on l’a fait et nos rues n’ont pas été envahies par les hordes touristiques UNESCO’mpatibles promises.  Les frères Lumière on en a fait cadeau à Lyon, Proudhon et Fourier faut pas déconner non plus et Tristan Bernard n’est-ce pas, il n’y a que les lecteurs assidus des citations pour papillotes qui le connaissent encore…
Donc on va mettre le paquet sur le Totor et là ça va péter vindjieu !

On peut lire aussi dans le BVV :

Dix ans après la célébration du bicentenaire de sa naissance, la Ville de Besançon a décidé que l’hommage à Victor Hugo serait désormais permanent, en ouvrant les portes de sa maison natale au public en 2013.

Diantre ! Un hommage permanent ! Vous vous rendez compte un peu ? On ne parle plus d’années en 2 là. Victor ce sera tous les jours de l’année et à toute heure. On va bouffer du Hugo à tous les repas.
On n’habitera plus à Besançon mais à Besançon-ville-natale-de-Victor-Hugo

Les grandes manoeuvres ont donc démarré et l’objectif premier est évident : il faut mettre le paquet sur le côté Victor Hugo ET Besançon. Il faut légitimer le lien entre l’homme et la ville. Montrer au monde entier que non non Totor n’a pas pu naître dans notre si jolie ville par hasard et que oui oui il existe des liens profonds entre le grand homme et notre cité.

En un slogan ça pourrait donner :

« Il faut bisontiner le soldat Hugo »

Voilà d’ailleurs ce que l’on peut lire au tout début de ce spécial BVVH (Besançon Votre Victor Hugo) :

Je vous propose d’analyser ce court passage qui méritera à n’en point douter de rester dans les annales de ce qui s’annonce déjà comme l’« annus horribilis ». L’année horrible pour tous ceux qui ne digèrent pas le Victor Hugo servi en trop grande quantité.

Certes, Victor Hugo ne sera pas resté longtemps à Besançon, six semaines dit l’histoire (…)

Notez que le mot histoire ne commence pas par un H majuscule. Il n’est donc pas question ici de la grande Histoire, de celle à laquelle contribuent par leurs recherches les historiens sérieux. Non, il s’agit ici de l’histoire avec un petit h. Celle qu’on se raconte au comptoir entre quidams. Une bonne histoire, comme une bonne blague. On pourrait presque parler de rumeur, tiens !

[quote]Dis-donc t’es au courant pour le Victor ? On dit qu’y s’rait né chez nous par hasard pis qu’y se s’rait barré vite fait. Il tétait encore, le gamin. Et t’as vu un peu le flan qu’y z’en font à la mairie avec le Victor !? Rôôôô… [/quote]

À la thèse dérangeante « des six semaines » on nous oppose donc celle « des spécialistes » dont fait partie Arnaud Laster qui :

« pense que le tout petit Hugo est resté plus longtemps qu’on ne le dit généralement »

Attention hein, Monsieur Laster ce n’est pas la moitié d’un Hugolâtre. Il est universitaire et président de la Société des Amis de Victor Hugo. C’est écrit.
Il ajoute :

« Ça peut être plusieurs mois, car les dernières recherches laissent apparaitre que son père est parti de garnison en juin. »

Voilà donc d’un côté l’histoire avec un toute petit h et de l’autre des « pense que », des « peut être que » et des « laissent apparaître » avancés par des experts spécialisés et des spécialistes plein d’expertise.
Ce que l’on ne précise pas dans le BVV c’est que cette « histoire » des six semaines ne date pas d’hier et qu’elle aussi est le fruit de travaux d’historiens, des vrais qui semblaient d’accord depuis belle lurette.

Mais soit, le Totor est peut être finalement parti de Besançon beaucoup plus tard que ce que nous pensions jusque là ; soit à l’âge respectable de… quatre mois !!!

Dingue ! À quatre mois on n’est plus tout à fait un bébé c’est vrai. À cet âge-là, la fontanelle se referme, la tête tient toute seule depuis un bon moment et on peut raisonnablement envisager de… tenir une plume ! Il était précoce le Victor. Si si.

Pour l’âge du départ c’est fait. Parlons un peu maintenant des racines comtoises. Que dit le BVV ?

Woua ! Un autre expert. Biographe de Victor Hugo ET directeur au CNRS en plus. Ça c’est ronflant. Et voilà que ce spécialiste nous apprend que la grand-mère paternelle était native de Dole.
Dole qu’au passage notre expert écrit avec un accent circonflexe sur le O mais ça on a l’habitude. Je la fais aussi couramment celle-là.
Une mamie de Dôle donc.
Et notre chercheur d’ajouter que Victor Hugo – s’il n’est jamais revenu à Besançon – « conserve pour cette ville un attachement particulier d’un bout à l’autre de sa vie… » . Puis de rappeler que l’écrivain « choisit tout de même de dire dans un poème connu dans le monde entier qu’il est né à Besançon ; ce n’est pas anodin ».

Ce qui est d’autant moins anodin cher Jean-Marc c’est que Victor Hugo avait adjoint à Besançon – sa ville natale – le qualificatif de « vieille ville espagnole »…
Sí señor. Il l’a fait !

Voilà où nous en sommes du bisontinage en cours de notre cher Victor ; et l’on peut parier sans risque – qu’avant l’ouverture de sa Maison natale en 2013 – on nous présentera tout plein de découvertes de spécialistes sur les liens entre le poète, sa ville natale et le pays comtois :

  • Victor et le cheval en bois que son oncle lui avait offert pour ses 3 ans. Jouet en provenance directe des artisans du Jura, ce département de la Région Franche-Comté dont la capitale est… Besançon.
  • Victor et l’horloge comtoise qu’il avait acquise pour ses vieux jours auprès d’un horloger qui se fournissait exclusivement à… Besançon.
  • Victor et le vin d’Arbois…
  • Victor qui écrivit dans « La légende des siècles » ce vers : « Mon père, ce héros au sourire si doux… »
    Hé oui ! Le Doubs ! Qui comme chacun sait coule à… Besançon !

Pour terminer, aller ! Un peu d’anticipation. Notre maire nous donne un aperçu de ce que sera la Maison natale de Victor Hugo :

(…) Une scénographie ludique et moderne animera le premier étage, où se situait l’alcôve natale. Cet étage sera entièrement consacré aux combats d’Hugo. Le sous-sol abritera une salle multimédia.

L’alcôve natale. Une salle multimédia. Moi qui suis un peu féru de nouvelles technologies – et je sais que mon maire l’est aussi – je me prends à rêver.

Je pense à la réalité augmentée. Vous savez, on enfile de grosses lunettes bizarres, un casque et on a l’illusion d’y être en vrai. On se balade dans les lieux d’aujourd’hui en voyant des images d’hier reconstituées en 3D avec le son en prime.

Ici l’alcôve natale. Dedans le nourrisson, il braille. Sa mère aimante est penchée sur lui. Elle le change.

Et nous, derrière nos grosses lunettes, nous nous apitoyons devant cette scène intime. On se sent un peu voyeur, un peu voyageur du temps car nous, on sait : ce gamin deviendra célèbre, il écrira des choses incroyables, il deviendra Victor Hugo

Dommage : il ne reviendra jamais chez nous. L’ingrat !

La boucle est bouclée

« J’ai rêvé qu’on retournait vivre à Besançon…… et on y était bien. »

J’étais loin de me douter que cette petite phrase anodine, lancée avant même le premier café de la journée, il y a un peu plus d’un an, allait être annonciatrice d’un réel retour bisontin !
Ben ouais, comme beaucoup, je pensais avoir fait « le tour de la question ».

Retour vers le passé : après des années à vivre, à travailler dans la « grande capitale franc-comtoise »……, quel bonheur de quitter (fuir ?) cette ville trop exiguë, presque ennuyeuse. C’est sûr y’avait mieux ailleurs.

Alors voilà, on a pris nos cliques et nos claques, et nous voilà partis vers de nouveaux horizons. Un voyage d’est en ouest en passant par Paname, arrêt inévitable pour petits provinciaux en recherche d’expériences inédites.
On a aimé ces endroits, on a aimé les rencontres, on a aimé ces découvertes culinaires, on a aimé ces nouvelles « terres pleines de contrastes », mais… MAIS…… partout, ce même sentiment de « manque ». Étrange. Un manque qui, à chaque petit retour en terre comtoise, enfle. Pourquoi ? Et si on ouvrait les yeux et si – enfin – on acceptait de regarder les choses en face.

Mais oui, on est bien à Besançon. On respire, on marche, on parle, on échange, on partage.… Ça va certainement vous faire rire sauf que, ce n’est pas rien. On ne se sent plus étranger parmi des étrangers. À avancer tels des zombis ou à végéter dans sa « bulle » socio-professionnelle.

Quel plaisir de redécouvrir cette petite ville préservée d’un développement trop brutal. Cette ville au patrimoine si riche qu’il en est quelquefois étouffant. Mais surtout cette ville où les habitants se mélangent encore…… Alors n’en déplaise à certains, on vit bien et serein à Besançon ! Cessons d’envier les autres, ne cédons pas aux sirènes du « toujours plus grand », sans pour autant fermer la porte à la nouveauté.

En bref, restons nous même car si la ville est un bien bel écrin, son vrai trésor réside dans ses habitants.

Estelle et Michel23

Photo : the Glint
Besançon par theGlint c’est ici.

Retrouvez Michel23 sur son blog « Il est pas bon mon jambon ?« 

Victorizo

J’ai fait un rêve… un drôle de rêve, une drôle d’idée.

Je vous explique : comme tous les 10 ans, Besançon s’apprête à célébrer dignement l’anniversaire de l’enfant le plus célèbre de la ville : Victor Hugo… 1802/2012
Sans doute avez-vous aperçu des affiches dans la ville ; la colle est encore toute fraîche. Sinon voici une mise en bouche :

http://franche-comte.france3.fr/info/besancon–le-grand-retour-de-victor-hugo–72215616.html

On le sait, c’est un fait : ce cher Totor a passé sa vie entière en étant convaincu d’être né en Espagne…

Extrait :

(…)
Alors dans Besançon, vieille ville espagnole,
Jeté comme la graine au gré de l’air qui vole,
Naquit d’un sang breton et lorrain à la fois
Un enfant sans couleur, sans regard et sans voix
(…)

C’est un peu ridicule mais il en est ainsi : les grands écrivains ont parfois des lacunes géographiques. Certains géographes – de leur côté – ont d’ailleurs du mal avec l’accord du participe passé lorsqu’il est employé avec l’auxiliaire avoir placé avant ou après le complément d’objet direct. Chacun son truc donc. On ne peut pas être bon partout.

Totor étant né en Espagne donc (en nuestra ciudad), ne pourrions-nous pas rendre hommage à son (très court) passage chez nous en s’évadant du pompeux et du révérencieux trop souvent de mise à son égard et en intégrant une ch’tite pointe d’humour aux festivités ?

C’est là que mon rêve intervient et l’idée dont j’ai rêvée est simple :

et si on organisait une paella géante sur la place de la Révolution !? Hein ?

Je ferme les yeux et je vois déjà Esmeralda passant de table en table pour y servir la sangria, au passage elle fait les lignes de la main de quelques Bisontins, leur prédisant si oui ou non le tram leur coûtera les yeux de la tête… Rhaaa Esmeralda !

La paella géante pourrait éventuellement être suivie d’un lâcher de taureaux dans la Grande rue. Ou pas.

¿Está de acuerdo?