On dirait que la mode prend. Elle a d’abord fait fureur à Paris – sur le pont des Arts – avant de se diffuser dans d’autres villes d’Europe mais aussi du monde entier.
Le nouveau pont Battant est ouvert depuis à peine plus d’une semaine et déjà, on compte plus d’une cinquantaine de cadenas de toutes sortes sur le grillage des rambardes.
Ce grillage plutôt léger supportera-t-il la charge ? À suivre…
Cette fois c’est fait : la campagne pour les prochaines élections municipales est lancée. Ce samedi 30 novembre 2013 aura vu le début des véritables hostilités.
Au menu, une conférence de presse à droite, un premier tractage à gauche et… pas mal de mouvement sur les réseaux sociaux.
Samedi matin, c’est Jacques Grosperrin, qui se réjouit le premier sur Facebook des accords de Granvelle (arf arf) signés le matin même. Un chouette mariage pour tous… Enfin… pour tous ceux de l’UMP, du MODEM et de l’UDI.
Sur Twitter – où il n’est présent qu’en période électorale – Jacques Grosperrin nous gratifie ensuite de ce joli loupé photographique.
Certaines mauvaises langues y verront sans doute l’illustration symbolique du quart de tour vers la droite amorcé ce matin-là par ceux qui se prétendaient, il y a quelques jours encore, du fameux « ni droite ni gauche » :
Une union qui serait parfaite si Jean-François Humbert (UMP lui aussi) ne s’était pas mis, il y a trois mois déjà, en mode « je vais y aller« . Même si personne ne croit vraiment qu’il ira jusqu’au bout, cet Humbert-là empêche nos nouveaux mariés de Granvelle de la jouer sur le mode « l’opposition est unie contrairement à la majorité sortante » .
Des blogs et des tweets
Tiens d’ailleurs. Que croyez-vous qu’il s’est passé du côté du PS ce samedi-là ? Eh bien on s’est empressé de lancer le site officiel de campagne et dans la foulée, le compte Twitter qui va avec. Le tout quelques heures après les fameux accords de Granvelle. Et puis plus tard dans l’après-midi, il y a eu tractage.
Ne jamais laisser l’adversaire occuper seul le terrain médiatique.
Du côté de Jacques Grosperrin, il y a aussi un site de campagne, disons plutôt un blog. Il a été rendu public quelques jours plus tôt.
Et puis il y a également un compte Twitter. Il n’est pas clairement assumé « de campagne » mais il n’a été actif que durant deux périodes : la campagne précédant les élections législatives de 2012 et là, depuis quelques mois, à l’approche des prochaines municipales.
Le compte Twitter de Jacques Grosperrin se présente comme le compte personnel du candidat :
Avantage d’un compte Twitter personnel : on peut y interpeller directement le candidat en campagne, lui poser des questions et échanger avec lui sur des points d’accord ou de désaccord. Parfait sur le papier, mais… Inconvénient : si le candidat ne répond pas ou ne réserve ses réponses qu’à quelques comptes identifiés comme « influents » (journalistes ou blogueurs), cela a le don d’énerver les twittos qui sont aussi – ne l’oublions pas – de potentiels électeurs.
Au final, c’est ballot voire contreproductif.
Or c’est précisément ce qui se passe avec le compte @jgrosperrin. Il est essentiellement utilisé pour diffuser de mini-communiqués au passage souvent incompréhensibles du fait de leur concision et d’une syntaxe pour le moins étrange :
Un compte Twitter qui – sans doute par souci de ne pas trop exposer le candidat – passe à côté de l’essentiel : créer le lien et le contact direct avec des abonnés Twitter également citoyens bisontins pour la plupart.
Et puis il faut bien dire que l’on se prend parfois à douter que Jacques Grosperrin gère lui-même son compte Twitter.
À moins que notre candidat soit affecté d’une alain-delonite aiguë, l’emploi de la troisième personne ne pardonne pas :
Revenons au candidat Fousseret. Son compte Twitter, contrairement à celui de son adversaire, assume dès son descriptif être celui de l’équipe de campagne de Jean-Louis Fousseret.
Et quand on pose la question, on obtient confirmation :
Une communication huilée
On dirait bien que l’on a tiré la leçon des erreurs d’en face du côté de JLF2014. Il semble même que l’on a décidé de mettre le paquet sur la com’ côté Twitter.
L’outil semble maîtrisé. La gestion du compte relève des techniques rodées du community managing :
– on accueille les abonnés ;
– on leur fait même des sourires ;
– on répond à tous,
– y compris aux détracteurs ;
– on instille habilement une petite dose d’humour et de complicité. On risque même quelques « mdr ! »
– on évite de se laisser « emmener » par les trolleurs ;
– on sait aussi ne pas répondre quand c’est préférable 🙂
Il est tellement lisse et efficacement communiquant ce compte Twitter de campagne de JLF 2014, qu’on a presque l’impression qu’il pourrait faire la com’ de manière interchangeable pour une marque d’aspirateur ou pour un opérateur de telecom.
Et qu’est-ce qu’il peut nous vendre comme sourires et petits moments de bonheur en famille !
Le problème avec les communications bien huilées c’est qu’il y a des spécialistes pour ça et que lorsque des militants sincères mais nullement experts en la matière décident de s’en mêler, cela peut vite gripper une si belle mécanique…
Les grains de sable
En réponse au tweet ci-dessus et à cette photo qui nous présente une famille Ingalls unie et souriante en train de tracter place du 8 septembre, je taquine un peu en m’étonnant de l’absence de certains élus sur la photo. Vous savez, ces élus qui ont appris il y a quelques jours qu’ils ne seraient pas sur la liste JLF2014 où pour certains, qu’ils y seraient en position non éligible :
Quelques minutes plus tard, c’est un militant PS qui me répond en substance que @manudumont (adjoint à la communication évincé de JLF2014) était bien là mais pas dans le cadre de la photo. Un tweet effacé depuis et vous allez vite comprendre pourquoi…
Puis c’est un autre militant du PS bisontin qui va dans le même sens :
Or voilà que quelques heures plus tard, une source très bien informée m’apprend une toute autre version que je twitte ce dimanche matin :
[précision : il est question d’une manifestation contre le racisme qui se déroulait également à ce moment-là sur la place du 8 septembre]
Je déclenche alors chez mon militant un agacement enrobé d’une couche de mauvaise foi tout à fait croustillante.
Mon geste de consolation restera vain : nous nous quittâmes fâchés.
On aurait pu en rester là. Mais le coup de grâce est venu d’un autre militant PS. Un Montebourien, comme Emmanuel Dumont. Visiblement le fait d’avoir vu sa présence à une manifestation voisine ainsi exploitée n’a pas dû plaire à ce dernier. Et c’est un autre qui se charge de rétablir la vérité :
Et voilà comment le travail d’un community manager autour de la thématique « TOUS UNIS » peut se retrouver ruiné en quelques tweets par la maladresse, la précipitation et le manque de méfiance de certains militants.
Au final, c’est une toute autre réalité qui est mise en lumière. Et cela s’est fait au grand jour.
De bons conseils
Il devient courant de voir débouler de nouveaux comptes de personnalités politiques sur les réseaux sociaux en période électorale. Sur Facebook, on connait la chanson : une page officielle est créée. Le candidat y publie des statuts et des photos que les abonnées – souvent acquis à sa cause – « likeront » et commenteront complaisamment. Une situation confortable qui peut aisément être déléguée à un aide-de-camp.
Sur Twitter, c’est différent et il est rare qu’un candidat tout frais débarqué le comprenne et ne tombe pas dans le piège d’une communication descendante et sourde totalement contreproductive.
Je vous conseille vivement sur le sujet cet excellent guide de mon ami legrugru. C’est aussi drôle que pertinent.
Tout candidat à une élection devrait le lire avant de débarquer sur Twitter et d’y planter son petit drapeau.
Tiens, on me signale à l’instant l’arrivée de l’adjoint Yves-Michel Dahoui sur Twitter. Une arrivée qui suit de quelques mois celle de Jean-Sébastien Leuba.
Comme quoi, on finit toujours par se retrouver entre soi sur les réseaux sociaux.
Ce jeudi 21 novembre 2013, en soirée, les militants du Parti Socialiste bisontin doivent se réunir pour choisir ceux qui, parmi eux, figureront sur la liste conduite aux Municipales par Jean-Louis Fousseret.
Raconté comme ça, c’est l’histoire d’un beau choix démocratique collectif. Mais la réalité semble bien différente. Dans un communiqué envoyé ce jour à la presse, Didier Gendraud – adjoint sortant à la Démocratie locale – explique une autre réalité. Et s’il a décidé de faire ainsi preuve de pédagogie explicative c’est précisément parce qu’il est parti pour être plus « sorti » que « sortant », Didier Gendraud. Puisqu’il ne figure pas sur la liste…
Et dans son communiqué, Didier Gendraud envoie du lourd. J’ai surligné le meilleur (à mon goût) :
Extrait :
Comment se déroule ce vote ? En répondant par oui ou par non à la proposition de liste dressée par une commission électorale. Qui trouve-ton dans cette commission ? Pêle-mêle siègent dix personnes : des représentants des différentes tendances du parti, la tête de liste mais aussi un fonctionnaire de la ville et deux élus sortants, candidats à leur reconduction. Connaissant la rigueur de ces derniers, j’imagine leur embarras devant la position de juge et partie qui a été la leur, d’autant que leur candidature a été retenue.
Je passerai sous silence l’éviction humainement brutale des lieutenants fidèles du Maire, mes collègues de la tendance Montebourg, tendance au passage ignorée sur cette liste.
Et de conclure :
Cette liste municipale sera-t-elle portée par une majorité de socialistes jeudi soir ? Au-delà, saura-t-elle séduire des Bisontins lassés de politique politicienne et désireux d’un nouveau souffle pour la ville ? Serai-je le seul à me poser des questions, à douter, à m’inquiéter ?
Il a bien raison de s’interroger M.Gendraud. Les divisions et les rancœurs se font jour. Une certitude : cette liste ne sera pas plébiscitée.
Et qui sait – une dissidence possible du côté des Montebouriens ?
Et puis du côté des écologistes (qui feront liste commune avec le PS et le PC), on nous prépare aussi une belle surprise à base de cumul des mandats décomplexé. De quoi générer une belle abstention au premier tour. Mais cela fera l’objet d’un autre très prochain billet.
On se souvient de cette formule maladroite de Jacques Grosperrin dans la Presse bisontine (septembre 2013) à propos de la liste d’opposition qu’il présentera aux élections municipales de mars 2014. :
« Ce ne sera pas une équipe d’enseignants et de fonctionnaires. Je ne veux pas d’un exécutif C.A.M.I.F., M.A.I.F., Télérama »
En ligne de mire, la liste de son adversaire et maire sortant de Besançon, Jean-Louis Fousseret.
Trop de fonctionnaires et surtout trop d’enseignants du côté gauche selon Jacques Grosperrin. Lui on ne l’y prendrait pas. Il s’entourera « d’experts« . Et tant pis si à l’occasion de cette boutade, le candidat de la droite nous a offert un paradoxe très croustillant.
Oui mais voilà, c’est du Grosperrin tout craché ça. Tenace et mordant mais pas très habile tacticien. Car l’argument des « experts économiques » face aux « enseignants gauchos », il fallait le garder pour plus tard. Ne jamais montrer son 21 – fût-il émoussé – en début de partie, c’est la règle.
En tout cas, cette fois c’est grillé.
En effet, la commission électorale interne au PS bisontin vient de rendre sa copie. Son rôle est de désigner les candidats PS qui occuperont les 27 places réservées à leur parti sur les 55 noms de la liste « gauche unie ». Les autres places seront réparties entre Europe Ecologie les Verts, le PC et des candidats dits « de la société civile ».
À la lecture de cette liste (encore confidentielle car pas forcément définitive), force est de constater que ce sont surtout les candidats enseignants de profession qui font les frais du choix d’une plus grande mixité socio-professionnelle. Certains sont relégués aux tréfonds de la liste. D’autres n’y figurent même pas. Parmi eux certains élus sortants qui n’imaginaient pas être écartés. Un fidèle lieutenant de Jean-Louis Fousseret, vous dites ? Qu’à cela ne tienne : il sort.
Cruelle politique.
Au passage, on remarque que tous les tenants de la tendance « Montebourg » (22,5% des suffrages au premier tour de la primaire socialiste de 2011) ont totalement disparu de cette liste. Abracadabra !
Par contre, on discerne dans la liste le nom d’un conseiller municipal sortant qui s’était illustré l’an dernier dans l’épreuve du « lancer de pavé dans la marre ». Une performance qui lui avait pourtant valu à l’époque les foudres de notre maire.
Mais voilà, le veinard n’est ni enseignant, ni fonctionnaire (ni Montebourien ?)
Au final, la liste Fousseret 2014 présentera un fort taux de renouvellement par rapport à l’équipe sortante (sans doute 16 nouveaux candidats sur les 27 places attribuées au PS).
Face à la lassitude d’un électorat à qui l’on ressert pour la troisième fois le même plat de résistance, le renouvellement d’une part non négligeable de « la carte » était sans doute nécessaire. Mais pour certains candidats éconduits, la pilule semble bien difficile à avaler. Surtout que, s’il est élu, Jean-Louis Fousseret a assuré que ce serait son dernier mandat et qu’il préparerait sa « succession ». Difficile d’imaginer que son/sa futur(e) « dauphin(e) » ne sera pas l’un des 27 désignés…
Quant à la liste la plus « CAMIF, MAIF, Télérama » – comprenez la plus pourvue en fonctionnaires – et si au final elle n’était pas à gauche ?
La semaine dernière, l’hebdomadaire la Voix du Jura publiait le « projet confidentiel de la nouvelle carte électorale élaboré par le président du conseil général, dans le cadre de la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, municipaux et communautaires, qui prévoit la refonte de la carte des cantons dans chaque département. »
(vous pouvez respirer)
Dans son dernier numéro, la Voix du Jura révèle que la publication de ce document lui a valu quelques déboires avec le président du Conseil général du Jura, Christophe Perny.
Tout aurait commencé par des pressions en amont :
Christophe Perny avait fait savoir, la veille [de la publication], au journaliste, via son cabinet, qu’il cesserait dans ce cas-là « toutes relations » avec notre journal.
Puis, dès le lendemain, la sanction :
(…) après parution, la directrice de cabinet informant le journal que les contrats publicitaires en cours étaient rompus.
L’article de la Voix du Jura :
Voilà donc un hebdomadaire jurassien sanctionné pour un billet ayant déplu au président du Conseil général du département.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que Christophe Perny s’attaque – au moins verbalement – à la presse quotidienne de son département. Généralement, c’est sur son mur Facebook – accessible à tous – qu’il se défoule de préférence sur le ton du mépris.
Ses publications y sont d’ailleurs parfois tellement navrantes que j’ai longtemps cru à un faux compte Facebook parodique. Pourtant non…
Le 19 avril dernier par exemple :
Une publication accompagnée de cette illustration :
Et puis le même jour (il était très énervé ce jour-là, Christophe Perny) :
Encore le 19 avril, c’est pour la presse nationale cette fois (on a visiblement frôlé la crise de nerfs) :
Heureusement, quelques jours plus tard, c’était la Journée Internationale de la Liberté de la Presse.
Ce jour-là, le président du Conseil général du Jura, rendit hommage – à sa façon – aux journalistes. Y compris ceux de la presse « locale ».
Avec la jolie photo qui va bien.
Ce jour-là, quelques journalistes jurassiens s’étranglèrent d’un rire nerveux.
Mais revenons à cette formule :
« J’ai pour eux et leur profession un profond respect »
Cette affirmation est elle encore crédible après ce dernier fait d’armes du président du Conseil général du Jura ? Peut-il encore proclamer son attachement à la presse et à sa légitime liberté ET punir quelques mois plus tard, par la rupture des contrats publicitaires en cours, un hebdomadaire qui a refusé de censurer l’un de ces articles ?
Au passage, rappelons que ces contrats sont financés avec de l’argent public.
Voilà encore une fois soulevée la question de l’indépendance éditoriale de la presse vis à vis de ses annonceurs ; des pressions que ceux-ci peuvent être tentés d’exercer directement sur les organes de presse. Mais également de l’autocensure que ces derniers peuvent s’appliquer pour ne pas risquer de froisser ceux qui contribuent pour une large part à leur financement.
À Besançon notamment, que ferait notre presse locale écrite, en ligne et radiophonique face à une polémique en lien avec le chantier du Tramway ? Imaginons par exemple une polémique au départ pas forcément excitante mais à laquelle la réponse officielle apportée serait prise en flagrant délit de mensonge. La presse locale l’évoquerait-elle ? Prendrait-elle le risque de froisser un annonceur généreux en encarts publicitaires papier pour les uns, en article publi-informatifs pour les autres et en annonces radiophoniques pour les derniers ? Devinez…
Revenons à notre cas jurassien. Dans une période où la presse écrite s’interroge sur sa survie économique, il nous offre le bel et triste exemple d’une situation certes anecdotique mais néanmoins inadmissible : un élu n’a pas à faire de chantage pernicieux (sans jeu de mots) à la presse pour la mettre au pas. A fortiori avec l’argent public.
Vladimir ! Sors de ce corps. Tu me rappelles le Schtroumpfissime tiens…
En décembre 2012, le site d’information en ligne Dijonscope, aujourd’hui disparu, s’était retrouvé écarté des listes de diffusion et autres invitations du Conseil général de Côte d’Or. Une manière de lui faire payer le contenu de certains billets. Quelques temps plus tard, constatant que son mode « tout gratuit financé par la pub » n’était pas compatible avec ses prétentions d’indépendance éditoriale, Dijonscope se lança dans l’aventure du financement par ses abonnés.
Une expérience qui s’arrêta en mai 2013 sans jamais avoir pu atteindre le nombre d’abonnés suffisant à son financement et à sa survie… sans publicité.
Ce mercredi 6 novembre, nous découvrions dans l’Est Républicain un article sur les ouvriers qui posent les pavés sur le parcours du tramway de Besançon.
On y lisait notamment ce passage dans lequel Jean-Charle Cuenot, directeur du groupement en charge de la pose des pavés, explique :
La partie surlignée en jaune n’a pas échappé à Michel Omouri (conseiller municipal UMP) qui publie le 8/11 un billet en forme de communiqué sur son blog.
Et voilà notre élu qui s’indigne de ces emplois occupés par des « paveurs portugais méritants ». Et de poursuivre en pestant contre ces « pavés chinois low-cost » . Et d’extrapoler enfin avec ironie sur « la qualité connue des productions chinoises » .
C’est de bonne guerre. Michel Omouri est élu d’opposition et nous sommes en pleine campagne pour les Municipales. Toute polémique est bonne à prendre. Mais disons-le, venant d’un sarkozyste patenté, le coup de la vierge effarouchée par le grand vilain libéralisme, c’est assez bluffant.
Des pavés chinois ?
De mon côté cela fait déjà quelques mois que je collecte des informations sur ces fameux pavés. Ils m’ont attiré l’œil dès le mois de mars dernier quand ils ont été stockés de manière très photogénique sur la place de la Révolution.
Comme vous l’avez peut-être déjà remarqué, les palettes sur lesquelles nos pavés sont conditionnés portent toutes une affichette. On y trouve des informations sur leur type, leur référence, le code correspondant à leur coloris, leurs dimensions et… leur provenance.
Exemple d’une affichette photographiée place de la Révolution en mars 2013. Observez le logo en haut à droite ainsi que les lettres soulignées.
XMSXD c’est Xiamen San Xiang Da, une société chinoise poids lourd de l’export de granit chinois vers le reste du monde. Extrait de la page de présentation de leur site Web :
Les pierres proposées proviennent principalement de Fujian, Shandong, Hebei, Nanjing, Guangdong etc.
Aujourd’hui SANXIANGDA exporte aux quatre coins du monde et notamment en France, Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Espagne, Nouvelle-Zélande, Maroc, Algérie, Portugal, Italie, Suisse, Grèce, Grande-Bretagne, Etats-Unis, Australie, Corée, Japon, Brésil, Dubai etc. La capacité d’exportation de SANXIANGDA est d’environ 3,000 containers par an.
Tiens, au passage, une information qui devrait en partie consoler Michel Omouri : Xiamen San Xiang Da est une filiale du groupe français VM Matériaux à Xiamen.
Alors ces pavés chinois, une surprise ?
Si Michel Omouri avait lu plus attentivement l’Est Républicain du 24/11/2012, il aurait déjà pu lancer cette polémique il y a presque un an. On y lisait un article de Serge Lacroix en forme de compte-rendu d’une matinée où la presse était invitée « par Jean-Louis Fousseret,en sa qualité de président de l’agglomération, à venir découvrir les quelques 14,5 kilomètres de tracé du chantier du tramway » .
À la fin de ce billet, nous apprenions :
Le tronçon Est, quant à lui, prend plus de temps, sauf place de la Révolution où les travaux de dallage seront les seuls à utiliser des pavés de Chine, pour être raccord. Ailleurs, les pavés viennent d’Espagne ou du Portugal.
Donc rien de nouveau sous le soleil. Les pavés chinois de la place de la Révolution étaient annoncés il y a un an déjà.
Les explications officielles
Le jour suivant le communiqué de Michel Omouri, un nouvel article paraît dans l’Est Républicain. Il revient sur cette polémique et donne la parole à Pascal Gudefin – chef du projet Tram – qui s’efforce de désamorcer en expliquant :
« Nous sommes dans un système économique libéral (…) où s’exerce la libre concurrence. Pour tout projet d’aménagement, des appels d’offres sont lancés. Et ne pas choisir des fournisseurs au prétexte qu’ils sont chinois reviendrait à faire du favoritisme, ce qui est répréhensible. »
Puis d’ajouter concernant le coût et la qualité des pavés :
« Par rapport à de la pierre française, leur coût est inférieur de 20 %. »
« Il va de soi que des garanties ont été demandées, et que ces pavés ont subi de nombreux contrôles. Leur qualité est irréprochable, tant pour leur résistance au gel que pour leur capacité à accepter le poids de véhicules lourds porteurs. »
Déminage
L’article de l’Est Républicain se poursuit et Pascal Gudefin achève de déminer la polémique :
[Pascal Gudefin] précise également que tous les pavés, loin de là, ne proviennent pas d’Asie. « Les chinois sont ceux qui sont de plus petite taille », explique-t-il. Ils sont posés sur une partie du quai Veil Picard, et sur la place de la Révolution.
Mais voilà, à l’évocation de pavés chinois sur le quai Veil Picard, l’auteur de l’article s’est soudainement rappelé de son billet de novembre 2012. Ce billet précédemment évoqué et dans lequel il relatait cette fameuse matinée « découverte du tram ». Et plus précisément lorsqu’il avait écrit que place de la Révolution « les travaux de dallage seront les seuls à utiliser des pavés de Chine, pour être raccord . »
Est-ce à dire que l’on promettait des choses en l’air il y a un an avant l’attribution des marchés ? Tiens tiens…. Ni une ni deux, notre reporter décide alors d’aller vérifier par lui-même sur le parcours du tram si on lui a bien dit toute la vérité …
Non, non, non… J’ai un peu extrapolé là, c’est vrai. En fait, ce dernier paragraphe n’est que science fiction. Personne à l’Est Républicain n’a fait ça. On s’est contenté de diffuser la version officielle telle que le chef du projet de Tram l’a fournie prête à imprimer. Et tout cela sans relever que cette version avait évolué depuis l’an dernier. Voilà qui aurait pourtant pu mettre la puce à l’oreille.
Et pourtant…
Et pourtant des pavés chinois, on n’en trouve pas seulement place de la Révolution à Besançon. La ville de Besançon m’avait d’ailleurs répondu sur ce point via son compte Twitter le 22 août dernier :
Dès août l’information avait donc été donnée officiellement : les pavés viennent tous de Chine et on ne les trouve pas seulement place de la Révolution et quai Veil Picard… comme on continue pourtant trois mois plus tard à le dicter à la presse quotidienne.
Et si on vérifiait ?
Samedi 9 novembre, jour de la parution de ce dernier article de l’Est Républicain, je suis monté sur mon vélo électrique (pièces chinoises, assemblage bisontin) équipé de mon smartphone (assemblé en Chine) afin de prendre quelques photos ; avec comme objectif de vérifier cette version officielle lue dans mon journal du matin :
Sur le tronçon Chamars, Grette, Planoise, Hauts du Chazal, je ne trouverai rien : les pavés sont déjà posés et tout est « clean ». Direction donc la partie Est du parcours du tram. Les parties pavées se trouvent principalement aux endroits piétonniers, sur les axes proches de la boucle et sur les places.
C’est parti :
Avenue Cusenier où les travaux de pavage battent leur plein :
Nous sommes à 400 m de la place de la Révolution et malgré la « version officielle », les palettes regorgent de pavés chinois estampillés XMSXD.
Et oh ! Suprise ! Ce ne sont pas seulement de « petits pavés » mais aussi de belles dalles de plus de 60 cm de long. Ne devaient-elles pas provenir d’Espagne ou du Portugal ?
Certaines sont même désignées « bordure » :
Un passage place Flore où le pavage va bon train.
Là aussi, on trouve des pavés XMSXD :
Mais aussi du Anjou Granit Import… made in China :
Et des dalles plus grandes dont celles-ci de 60 x 60 cm :
Allons maintenant du côté des Vaites. Là le tracé du tramway est moins avancé. Sur un terrain vague, le long du chemin du Vernois, sont stockés les pavés, dalles et bordures de granit qui vont être employés sur la fin du tracé Est.
Et là aussi, surprise. Un peu partout :
On y trouve même de « petits pavés » d’un mètre de long. Ce sont des dalles en relief pour les non-voyants :
Retour sur le quai Veil Picard dont seuls les « petits pavés » sont supposés venir de Chine… C’est loupé :
En vérité, les petits pavés de droite ET une bonne partie des dalles (pour ne pas dire toutes) que l’on voit à gauche sur la photo viennent de Chine. Les affichettes présentes sur les nombreuses palettes en attestent.
Quand à la place Jouffroy d’Abbans en cours de travaux, elle aussi sera recouverte de pavés chinois :
La référence de granit G682 n’est en effet produite qu’en Chine :
Un petit tour de vélo aurait donc suffi à barrer les mentions inutiles mensongères avant publication. Encore faut-il avoir un vélo.
Au fait, acheter des pavés chinois, c’est mal ?
Ne nous voilons pas la face. Il a bon dos Michel Omouri de tomber des nues en découvrant que Besançon s’apprête à faire rouler son tramway de marque espagnole sur des pavés chinois. Le granit chinois inonde littéralement le BTP mondial depuis le début des années 2000. Et M.Omouri sait très bien que ce n’est pas l’apanage des villes de gauche que de l’utiliser. Nombre de villes UMP en sont également pavées.
« Les Chinois ont débarqué il y a cinq ans et se sont adjugé depuis la majorité des gros marchés, comme les réseaux de tramways », confirme Philippe Robert, PDG de La Générale de granit, l’une des premières graniteries de France, basée à Louvigné-du-Désert, en Ille-et-Vilaine.
En 1997, la France avait importé 186 tonnes de pavés ou bordures chinois. En 2002, les importations ont atteint 29 398 tonnes et, au premier trimestre 2003, la Chine est devenue officiellement le premier exportateur mondial de granit. Un matériau proposé en moyenne de 30 à 40% moins cher que la production française.
Un granit moins cher pour diverses raisons : un coût de la main d’œuvre moins élevé, des conditions de travail moins exigeantes et dont au final on ne sait pas grand chose… Des contraintes environnementales, fiscales et sociales bien plus souples que celles que nous connaissons en Europe… Autant de raisons qui font que les granitiers français de Bretagne ou des Vosges par exemple ne peuvent plus s’aligner et disparaissent petit à petit. Même le tramway de Brest utilise deux tiers de pavés chinois sur son tracé, c’est dire.
Mais que faire ? Les appels d’offres suivent des règles bien précises et même si l’on pouvait passer outre en y intégrant des exigences de coloris ou de types de granit produit uniquement en Bretagne par exemple, que dirait cette fois les élus d’opposition : que c’est trop cher ? Aurions-nous d’ailleurs les moyens de nous offrir un revêtement en granit à ce prix-là ? Pas sûr.
À la vérité, c’est le système global qui se mord la queue. Les règles de notre système libéral mondialisé nous poussent à scier la branche sur laquelle nous sommes assis.
Nous aurons nos pavés moins chers grâce au granit de Chine ? Soit. Nous sommes satisfaits. Les carrières de granit des Bretagne sont loin d’ici et ça n’entraînera pas de chômage chez nous.
Par contre, les Bretons… dites, ce serait sympa d’acheter Peugeot quand vous changerez de voiture, hein ? Ça crée des emplois chez nous vous comprenez ?
Oui je sais, c’est un peu simpliste mais il y a un fond de vrai, non ?
Et quid de la qualité ?
Là dessus on est en droit de dire… « qui vivra verra » car d’autres villes ont connu des précédents fâcheux. Notamment à Toulouse et Belfort, où il y a quelques années, la place Corbis fut entièrement pavées d’un granit chinois qui ne résista par aux frimas de l’hiver comtois. Alors certes le chef du projet Tram nous promet « une qualité irréprochable » mais comment le croire après ce flagrant « déni » de pavés chinois ?
Pourquoi toutes ces cachoteries ?
Visiblement cette polémique dérange. Elle est lancée par un élu d’opposition à quelques mois des élections municipales. Alors on préfère atténuer les choses en prenant des libertés avec la vérité, au risque finalement d’amplifier ladite polémique : juste des petits pavés, de tout petits pavés et seulement place de la Révolution et un peu sur le quai Veil Picard. Ben voyons…
Peut-être souhaite-t-on également ménager la sensibilité des nombreux aficionados locaux (élus pour certains) d’Arnaud Montebourg et de son combat (au moins médiatique) pour le redressement productif… Des pavés chinois ? Et des gros ? Nombreux en plus ? Vous n’y pensez pas ?
Quant à l’Est Républicain on ne peut pas lui en vouloir d’avaler les couleuvres d’un si fidèle annonceur. Et puis creuser dans le granit, fût-il chinois, c’est bien trop fatigant.
Toutes les photos prises lors de ma petite balade à vélo
sont géolocalisées sur cette carte.
Depuis hier, on replante des arbres sur le quai Veil Picard. Des tilleuls euchlora comme sur le quai de Strasbourg. Ces nouveaux spécimens ont été cultivés au Pays-Bas.
L’aspect des bestiaux est pour le moins surprenant : taillés « en rideau » pour ne pas gêner Monsieur Tram et ses câbles aériens, on les croirait en deux dimensions. À l’heure de la 3D omniprésente, c’est ballot.
On attend impatiemment le printemps prochain, les brindilles naissantes et les nouvelles feuilles qui donneront un peu de tenue à tout. Pour l’instant on se croirait presque revenu au bon vieux temps du télégraphe :
Mais au-delà de l’aspect de ce qu’il va bien falloir s’habituer à nommer « des arbres », c’est la hauteur de ses nouveaux tilleuls qui a le goût amer d’une promesse non tenue :
Les six mètres promis ont visiblement été victimes d’une cruelle récession économique botanique. Ces premiers tilleuls replantés entre Canot et l’encorbellement mesurent à tout casser 4 mètres et en étant large.
Il faut dire que depuis quelques temps, on nous avait préparés à cette révision à la baisse. Tout d’abord dans une interview du responsable du projet tramway que l’Est Républicain publiait le 8 octobre dernier :
« Nous allons planter des tilleuls d’une taille respectable », explique Pascal Gudefin, le patron du projet. Hauts de 4 à 5m, les arbres ont déjà une dizaine d’années. Cultivés aux PaysBas, ils ont été régulièrement déplacés, pour les habituer à leur transplantation définitive. »
Mouais, le 4 à 5 mètres c’était pour faire généreux. On est dans la fourchette basse. Peut-être même en-dessous.
Mais voilà : une taille « respectable » pour Pascal Gudefin. Une taille « conséquente » pour le BVV. Et comme dans les Jardins du Luxemboug À PARIS sacrebleu ! Si avec ça on ne vous convainc pas qu’ils sont vachement grands ces arbres !
Heureusement ils grandiront. En tout cas, on l’espère.
Terminons sur une note positive parce que zut quoi ! De nouveaux arbres ont été replantés place de la Révolution et ils dépassent largement les 6 mètres de haut :